Un défenseur de l’environnement militant contre un mégaprojet pétrolier de TotalEnergies en Ouganda, disparu depuis mardi 4 juin, a été retrouvé « mal en point », a affirmé lundi à l’AFP son association, en affirmant qu’il a été arrêté et battu par des militaires.
Dimanche soir, Stephen Kwikiriza « a été jeté le long d’une route à Kyenjojo », à environ 250 kilomètres à l’ouest de la capitale Kampala, a déclaré le directeur de l’Environmental Governance Institute (EIG), Samuel Okulony, dans un message à l’AFP.
Selon les premiers éléments fournis par Stephen Kwikiriza, il a été « battu » par des militaires et « est manifestement mal en point », a-t-il détaillé, ajoutant que le militant est actuellement suivi à l’hôpital de Nsambya.
Selon un militaire haut gradé de l’armée ougandaise, qui a requis l’anonymat, Stephen Kwikiriza « a été placé en garde à vue pour être interrogé sur ses activités illégales, notamment sur la mobilisation d’autres militants contre l’oléoduc ». Il a affirmé ne « pas avoir été informé qu’il avait été battu pendant son interrogatoire ».
« C’est une question qui peut faire l’objet d’une enquête et d’une vérification », a-t-il conclu. « Ils n’ont cessé de le déplacer d’un endroit à un autre et, à chaque nouvel endroit, il était tabassé », a de son côté affirmé M. Okulony.
Un pipeline de près de 1 500 kilomètres
Plusieurs ONG, dont la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et Human Rights Watch (HRW), s’étaient inquiétées de la disparition depuis mardi de Stephen Kwikiriza. La FIDH avait dénoncé « une escalade particulièrement inquiétante de la répression » contre les opposants au mégaprojet de TotalEnergies, affirmant qu’elle a visé onze défenseurs de l’environnement entre le 27 mai et le 5 juin.
Dans un communiqué transmis samedi à l’AFP, TotalEnergies a affirmé suivre « la situation de très près », et a assuré ne « tolérer aucune menace ou attaque contre ceux qui défendent et promeuvent pacifiquement les droits de l’homme ».
TotalEnergies a annoncé en 2022 un accord d’investissement de 10 milliards de dollars avec l’Ouganda, la Tanzanie et la compagnie chinoise CNOOC, comprenant notamment la construction d’un oléoduc (EACOP) de 1 443 kilomètres reliant les gisements du lac Albert, dans l’ouest de l’Ouganda, à la côte tanzanienne sur l’océan Indien. Le projet est dénoncé par des organisations de protection de l’environnement qui estiment qu’il menace le fragile écosystème de la région et des populations qui y vivent.
Vingt-six Ougandais et cinq associations françaises et ougandaises ont lancé en juin 2023 une action civile pour demander « réparation » devant le tribunal de Paris de divers préjudices (expropriations abusives, compensations insuffisantes, harcèlement…).
Les associations Darwin Climax Coalitions, Sea Shepherd France, Wild Legal et Stop EACOP-Stop Total en Ouganda ont également déposé en septembre en France une plainte au pénal, qui est, selon elles, « inédite » car elle assigne TotalEnergies « devant le juge pénal pour des faits s’apparentant à un climaticide ».
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Le président ougandais Yoweri Museveni, qui dirige le pays d’une main de fer depuis 1986, a décrit le projet à plusieurs reprises comme une source économique majeure dans ce pays enclavé.