une plainte à Paris pour « élucider » la mort de deux militaires français pendant le génocide des Tutsi

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La justice française est saisie depuis lundi 8 avril d’une plainte pour « élucider » la mort de deux militaires français, René Maïer et Alain Didot, et de l’épouse de l’un d’eux, Gilda Didot, début avril 1994, peu après le déclenchement du génocide des Tutsi au Rwanda.

Cette plainte contre X avec constitution de partie civile, qui permet d’obtenir quasiment systématiquement des investigations, est déposée au nom de l’association française Survie et de deux membres de la famille de l’épouse d’Alain Didot. La plainte, consultée par l’AFP, dénonce les infractions de crime de guerre, homicide volontaire et usage de faux en écriture.

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Trente ans après les faits, « cette plainte vise à établir les responsabilités concernant la mort de deux gendarmes français et de l’épouse de l’un d’eux, à Kigali (…) dont les circonstances demeurent mystérieuses », précise dans un communiqué de Survie, affirmant que ces trois Français sont de « potentiels témoins » de l’attentat contre l’avion du président hutu rwandais Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994.

Cet attentat est l’élément déclencheur du génocide qui a fait plus de 800 000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement parmi la minorité tutsi. Depuis dimanche, le Rwanda marque le 30anniversaire du génocide qui a plongé ce petit pays dans les abysses. La communauté internationale avait été vivement critiquée pour son inaction avant et durant le génocide.

Faux certificats de décès

Au début des années 1990, la France soutient le président Habyarimana, un Hutu en butte à la rébellion tutsi du Front patriotique rwandais (FPR), basée en Ouganda et menée par Paul Kagame. Après une offensive du FPR déclenchée le 1er octobre 1990, Paris envoie dans le cadre de l’opération « Noroit » jusqu’à 600 soldats.

Dans ce cadre, l’adjudant-chef Alain Didot, mécanicien radio, arrive à Kigali à l’été 1992 avec son épouse, Gilda. « Conseiller auprès des FAR » [Forces armées rwandaises] et assurant « la sécurisation des communications de l’ambassade de France », il avait installé à son domicile une station radio, selon la plainte. Il « occupe donc une fonction aussi centrale que sensible ». L’adjudant-chef René Maïer arrive, lui, à Kigali en septembre 1993 comme assistant militaire technique.

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Alors que débutent les massacres, l’adjudant-chef Didot n’est plus joignable par radio à partir du 8 avril à 14 heures. Il était chez lui avec son épouse. « Le 8 avril à 17 heures, le couple Didot est signalé mort par des témoins », selon la plainte. Des casques bleus belges récupèrent dans le jardin de la villa les dépouilles du couple et de leur jardinier rwandais le 12 avril, puis celle de René Maïer le lendemain.

Les corps des trois Français sont rapatriés en France après un passage à Bangui (Centrafrique), où sont établis les certificats de décès. Mais ces certificats – au nombre de huit pour les trois victimes – sont des faux, estiment les plaignants : les dates et les motifs sont « variables », mort « accidentelle » ou par « des armes à feu ». Aucune autopsie n’a été pratiquée et aucune enquête n’a été diligentée sur ce triple homicide.

En lien avec l’attentat de l’avion présidentiel ?

Comme « éléments suspects », la plainte pointe notamment « la synchronicité de ces décès avec l’attentat » contre l’avion et « une note de la DGSE [qui] suggère que les trois Français ont pu être éliminés parce qu’ils avaient été témoins de l’attentat ».

La mort des trois Français a néanmoins été abordée lors des investigations à Paris sur l’attentat contre l’avion présidentiel, dans lequel sont morts trois membres d’équipage français, et qui ont abouti à un non-lieu. S’est alors posée la question du « lien » entre l’attentat et la mort des deux militaires qui ont pu « entendre un message révélateur des circonstances de l’attentat » via la station radio, selon la plainte.

« Ils savaient quelque chose et on les a tués pour cela », a réagi auprès de l’AFP MHector Bernardini, avocat des plaignants avec MJean Simon. « Elucider ce mystère, c’est élucider le dossier de l’attentat sur l’avion présidentiel. Quelques personnes bien informées et prudentes ont voulu enterrer cette affaire », a-t-il ajouté.

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« Nous espérons que, malgré les évidentes gênes qui ont entouré cette affaire, la justice contribuera à dissiper des zones d’ombre qui persistent dans ce quadruple homicide et sur la possible implication française dans l’attentat du 6 avril 1994 », déclarent dans le communiqué Mes Bernardini et Simon.

Le Monde avec AFP

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