C’est une première victoire pour Eric Dupond-Moretti dans la bataille contre la procédure engagée à son encontre par la Cour de justice de la République (CJR) pour « prise illégale d’intérêts ». La Cour de cassation a décidé, vendredi 17 février, de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée le 3 février par l’intermédiaire de son avocat, Patrice Spinosi. Elle estime que cette QPC, « qui fait valoir que le législateur n’a pas précisé dans la loi les conditions dans lesquelles un juge peut effectuer une perquisition au sein d’un ministère, présente un enjeu institutionnel au regard du principe de séparation des pouvoirs, dès lors qu’un ministère est un lieu d’exercice de l’action gouvernementale. »
La procédure engagée par Eric Dupond-Moretti venait en soutien à sa demande d’annulation de la perquisition du 1er juillet 2021. Ce jour-là, pendant quinze heures, des magistrats de la CJR – juridiction spéciale chargée de juger les ministres pour les délits commis dans l’exercice de leurs fonctions –, accompagnés d’une vingtaine de gendarmes de la section de recherche de Paris, s’étaient présentés en début de matinée Place Vendôme pour perquisitionner le ministère. Il est reproché au ministre de la justice d’avoir, quelques semaines après sa nomination, ordonné à l’inspection générale de la justice des enquêtes administratives, étape préalable à une procédure disciplinaire, contre des magistrats avec qui il avait été en opposition en tant qu’avocat.
Le 3 février, devant l’assemblée plénière de la Cour de cassation, sa formation la plus solennelle, l’objet des débats n’était pas de se prononcer sur le bien-fondé de la perquisition de 2021, ni de savoir si cette mesure était, ou non, disproportionnée. Le point de droit soulevé par Me Spinosi était de déterminer si une perquisition dans un ministère, lieu d’exercice du pouvoir exécutif, ne contrevenait pas à la séparation des pouvoirs, principe constitutionnel. De même, il s’agissait de savoir si le législateur n’avait pas méconnu son office en ne prévoyant pas des mesures spécifiques encadrant les perquisitions dans les ministères.
« Un nouveau désaveu pour la CJR »
L’articulation inédite de ces deux griefs, atteinte à la séparation des pouvoirs et incompétence négative du législateur, a été le cœur de la réflexion de Me Spinosi. Et c’est ce qui a emporté la décision de la Cour de cassation, qui estime que « la question posée est nouvelle et, par conséquent, décide de la transmettre au Conseil constitutionnel ».
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