visite controversée du gouverneur du Xinjiang chinois en Europe

Erkin Tuniyaz, le gouverneur du Xinjiang, où se déroule un « génocide » contre la minorité ouïgoure, selon un vote récent de l’Assemblée nationale, devait commencer lundi 13 février une tournée diplomatique très controversée en Europe. A Londres, il doit être reçu cette semaine par des officiels du ministère des affaires étrangères britannique. Selon nos informations, il prévoit ensuite de se rendre à Paris. L’ambassade de Chine en France a envoyé des invitations à une réception en son honneur pour le 17 février dans la soirée. Contactée par Le Monde, elle n’a pas donné suite à nos demandes de renseignements. Puis, M. Tuniyaz doit visiter Bruxelles entre le 19 et le 21 février.

Depuis décembre 2021, M. Tuniyaz est pourtant sous le coup de sanctions des Etats-Unis, qui l’accusent de « sérieuses violations des droits de l’homme » et l’ont interdit de séjour sur leur territoire. En tant que gouverneur de cette province du nord-ouest de la Chine, il est l’exécutant de la politique de persécution des Ouïgours, une minorité musulmane. Un réseau de camps d’internements systématiques y a été mis en place, ainsi que du travail forcé, des tortures, des viols systématiques ou encore une politique de stérilisation forcée.

Mais M. Tuniyaz n’est sous le coup d’aucune sanction en Europe. « La Chine mène actuellement une offensive pour essayer de reconstruire son image et elle considère l’Europe comme le maillon faible, percevant une faiblesse », dénonce Zumretay Arkin, du Congrès mondial ouïgour, une association basée en Allemagne, qui défend cette minorité. Selon une source diplomatique, la visite de M. Tuniyaz viserait effectivement à rétablir un canal avec l’Union européenne, mais aussi à rechercher de nouveaux investisseurs pour sa région.

« Succès pour la propagande chinoise »

La révélation de cette encombrante visite est venue initialement du Royaume-Uni. Des officiels du ministère britannique des affaires étrangères ont accepté, très discrètement, de rencontrer M. Tuniyaz. Aucun ministre ni secrétaire d’Etat ne doit le recevoir, seuls des diplomates seront présents. Ceux-ci ont prévenu à l’avance des réfugiés ouïgours de cette rencontre, demandant à les consulter, lundi, en amont de cette réunion.

Choqués, les Ouïgours basés au Royaume-Uni ont tiré la sonnette d’alarme. Ils ont prévenu l’Alliance interparlementaire sur la Chine (Ipac), un groupe de députés britanniques qui prônent une ligne dure contre Pékin. Ceux-ci ont provoqué, jeudi 9 février, un débat urgent à la chambre des Communes. « [Cette visite] est un succès pour la propagande chinoise, dénonce Iain Duncan Smith, ancien leader du parti conservateur et l’un des membres les plus actifs de l’Ipac. Le gouverneur Tuniyaz a soutenu le développement des camps de détention de masse et accéléré leur utilisation pendant son mandat. Plus d’un million de Ouïgours et d’autres membres de minorités musulmanes ont été détenus au Xinjiang. »

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