A Pontivy, la CGT refuse d’abandonner la colère rurale au Rassemblement national

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Son rire franc résonne. Il suffit de l’entendre pour savoir que Christian Bernard est arrivé dans les locaux de la CGT de Pontivy (Morbihan). Autour d’une tasse de café, le porte-parole des syndicalistes retraités du secteur s’amuse à rejouer son parcours professionnel : « J’ai cumulé 2 226 jours de chômage avant de passer de l’autre côté du comptoir de l’ANPE. »

Il est comme ça, Christian Bernard. Toujours prêt à une espièglerie pour détendre l’atmosphère. D’autant que l’ambiance est pesante depuis les résultats des élections européennes, le 9 juin. A Pontivy et ses alentours, le Rassemblement national (RN) a convaincu 34,39 % des électeurs et est arrivé en tête dans les 49 communes de la 3e circonscription du Morbihan. Région historiquement la plus rétive aux idées d’extrême droite, la Bretagne n’est plus une terre de mission pour le parti de Jordan Bardella.

Christian Bernard, responsable du syndicat multiprofessionnel de l’UL Pontivy-Loudéac de la CGT. "Pendant les manifestations contre la réforme des retraites on est montés jusqu'à 8000 personnes mobilisées à Pontivy mais ce n'est pas le nombre le plus important. Même si on se mobilise à 50, on occupe l'espace, c'est important." , à Pontivy, le 24 juin 2024. Christian Bernard, responsable du syndicat multiprofessionnel de l’UL Pontivy-Loudéac de la CGT. "Pendant les manifestations contre la réforme des retraites on est montés jusqu'à 8000 personnes mobilisées à Pontivy mais ce n'est pas le nombre le plus important. Même si on se mobilise à 50, on occupe l'espace, c'est important." , à Pontivy, le 24 juin 2024.

Ce midi, à quelques mètres du local du syndicat, Antoine Oliviero, un commercial de 25 ans inconnu avant d’être investi par le RN, tracte sur la place du marché. Un symbole. C’est ici que les syndicalistes de la CGT, connus pour orchestrer les mobilisations sociales sur le territoire, ont l’habitude de conclure leurs manifestations. Samedi 15 juin, ils avaient rassemblé 400 personnes contre l’extrême droite.

Le regard azur de Ronan Le Nézet, responsable de l’antenne locale du syndicat, se durcit : « Beaucoup se sont réveillés le 9 juin, surpris par cette vague brune. Ça fait des années qu’on alerte. Des années qu’on a l’impression de se battre, seuls, contre l’extrême droite. » Ton grave, Christian Bernard parle, lui, de « tous les ressentiments accumulés ». « Notre Bretagne rurale a été trop longtemps oubliée. Les quatre voies desservent les côtes et les métropoles, pas les terres. Emmanuel Macron a fini par tout faire exploser », assène de son côté Annie Dagorne, secrétaire de mairie investie désormais à temps plein dans le syndicat.

Le dérapage présidentiel

Le rejet du chef de l’Etat est effectivement l’argument le plus avancé par les électeurs du RN dans ce territoire façonné par l’agroalimentaire. La moitié des emplois dépendent des usines de production et de transformation alimentaire. Ici, il y a, certes, peu de chômage, mais beaucoup d’emplois précaires. L’« agro » est devenu un vivier de voix pour l’extrême droite. Ronan Le Nézet, ouvrier de maintenance dans une usine de salaison, confirme : « Inexistant localement, le RN s’est nourri de la colère envers ce président qui n’a eu de cesse de cliver les classes populaires. »

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