L’avenir dira ce qui relève de la rhétorique et du lyrisme de circonstances et ce qui marque un vrai tournant, une inflexion durable. Une chose est toutefois déjà sûre : Emmanuel Macron a placé très haut l’ambition d’une relance de la relation franco-marocaine dans son discours prononcé mardi 29 octobre devant le Parlement à Rabat, temps fort du deuxième jour de sa visite d’Etat dans le royaume chérifien. Il n’était que de relever le recours à plusieurs reprises au mot « stratégique ». « Un devoir stratégique », a-t-il même dit en évoquant la nécessité d’étoffer les liens entre la France et le Maroc et, au-delà, l’Europe et l’Afrique à l’heure de l’aggravation des tensions migratoires, climatiques, alimentaires et sécuritaires.
Aussi est-ce tout naturellement qu’il a réutilisé le mot fétiche en proposant au roi Mohammed VI d’inscrire les deux pays dans un « nouveau cadre stratégique », a-t-il révélé à la tribune du Parlement. Un tel format ferait du Maroc, a précisé M. Macron, « le premier pays hors de l’Union européenne [avec lequel] nous nous engagerions ensemble aussi intensément ». Un texte formalisant ce « nouveau cadre stratégique » pourrait être signé lors d’une visite d’Etat du roi à Paris en 2025, à l’occasion du 70e anniversaire de la déclaration commune faite à La Celle-Saint-Cloud (Yvelines). Le document, signé le 6 novembre 1955 par le sultan Mohammed V et Antoine Pinay – alors ministre français des affaires étrangères – avait ouvert la voie à l’indépendance du royaume l’année suivante.
Avec cette visite d’Etat annoncée de Mohammed VI dans l’Hexagone, l’agenda franco-marocain est donc voué à se densifier sur une échelle inédite alors que la foison de contrats, lettre d’intention et autres projets de partenariat signés lundi et mardi à Rabat – d’une valeur de 10 milliards d’euros – va jeter les bases d’une coopération multiforme dans les domaines de la transition énergétique, des infrastructures et des transports, de l’éducation, du numérique etc.
Autant de synergies potentielles, a insisté M. Macron dans son adresse aux députés marocains, au service de l’impératif de « décarbonation » de l’économie du royaume à travers la production d’énergies renouvelables (solaire, éolien, hydrogène vert), ces dernières pouvant en outre fournir un « approvisionnement de proximité » à l’Europe. De son côté, le Maroc pourrait permettre une « intégration des chaînes de valeur » afin de protéger l’Europe et l’Afrique de la « fragmentation du commerce international ». Ainsi le royaume constitue-t-il aux yeux de M. Macron « une plateforme », un « truchement » entre l’Europe et l’Afrique. Bref, « un chemin singulier ».
Il vous reste 60.44% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.