aux obsèques de la jeune Kanak tuée le 15 mai, « la lutte continue »

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D’abord, laisser les « tontons utérins », ses oncles maternels, faire leur travail. Eux qui lui avaient symboliquement insufflé la vie à sa naissance doivent habiller la défunte et ouvrir la cérémonie. Nassaïe Doouka, part, ce samedi 1er juin, devant sa famille réunie. La coutume se déroule avec gravité dans la petite salle de veillée numéro 8, au grand cimetière du 5e Kilomètre à Nouméa.

La jeune Kanak de 17 ans a été tuée le 15 mai à Ducos, quartier du Grand Nouméa, par un Caldoche qui lui a tiré avec précision dans la tête, avec son fusil. Les images de Nassaïe gisant à terre sur la route vont faire le tour des réseaux sociaux en Nouvelle-Calédonie.

Des proches de la famille brandissent des drapeaux kanak aux funérailles de Nassaïe Doouka, à Nouméa, Nouvelle-Calédonie, le 1er juin 2024 Des proches de la famille brandissent des drapeaux kanak aux funérailles de Nassaïe Doouka, à Nouméa, Nouvelle-Calédonie, le 1er juin 2024

Elle vient, alors, de tomber parmi les toutes premières victimes de l’insurrection qui a éclaté deux jours plus tôt avec fracas. Ce 15 mai, quatre personnes vont mourir, trois Kanak – outre Nassaïe, son cousin Chrétien Neregote, 36 ans, et Jibril Salo, 20 ans, étudiant originaire de l’île de Maré – ainsi qu’un gendarme, Nicolas Molinari, 22 ans, venu de Seine-et-Marne.

Les obsèques commencent aussi par un geste de « pardon » de la part de ceux qui sont chargés de la cérémonie. Elle ne peut se tenir comme il se doit, car les autorités ont scellé le cercueil blanc devant lequel mère et tantes pleurent. Sur le couvercle recouvert du drapeau bleu-rouge-vert de la Kanaky, les photos du souvenir attirent le regard.

« Ce n’est pas une mort normale »

Sourire espiègle en coin, dreadlocks coupées au carré. Avant-dernière d’une fratrie de six, Nassaïe – son prénom français est Stéphanie – est issue d’une famille de l’île de Lifou du côté maternel, de Canala sur la Grande Terre du côté paternel. A l’aube de ses 18 ans, elle avait arrêté le lycée et s’apprêtait à remplir un dossier pour s’engager dans l’armée de l’air. Comme l’a fait avant elle sa cousine avec laquelle elle partageait tout, la fête comprise. « C’était une jeune fille pleine de joie », déclare son grand-père Jacky Doouka. « Ce n’est pas une mort normale. Elle a été assassinée. Ici, il y a deux catégories de personnes et nous avons toujours été les derniers. On ne peut pas nous assassiner comme ça chez nous, en Kanaky. »

La famille et les proches se relaient dans la salle de veillée lors des funérailles de Nassaïe Doouka, à Nouméa, Nouvelle-Calédonie, le 1er juin 2024. Le portrait de la jeune femme est affiché sur son cercueil. La famille et les proches se relaient dans la salle de veillée lors des funérailles de Nassaïe Doouka, à Nouméa, Nouvelle-Calédonie, le 1er juin 2024. Le portrait de la jeune femme est affiché sur son cercueil.

Dans la chapelle ouverte au vent doux qui balaie le cimetière, les proches, quelque cent cinquante personnes, entonnent des chants. Le pasteur Jean-Paul Noël ouvre le livre de Job dans lequel, en vain, Satan défie Dieu : « Nous avons tous des questions sur la mort de “Nana”. Laissez-moi vous encourager ce matin avec cette parole. » L’homme d’Eglise souhaite encore apaiser les cœurs pleins de colère.

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