L’innovation mérite un effort spécifique de la part de la communauté nationale, et donc, des dispositifs de financement qui permettent de soutenir la créativité, l’expérimentation et la recherche et développement (R&D). Pour autant, questionner les aides à l’innovation ne doit pas être tabou, surtout au regard des sommes importantes qui y sont consacrées, notamment les 7 milliards d’euros que coûte chaque année le crédit d’impôt recherche (CIR).
Mais au-delà des débats sur l’efficacité de ces aides, il conviendrait d’en (re)définir le sens politique et d’assumer les choix qui les fondent. En quoi les innovations qui bénéficient de cette dépense publique servent-elles notre société en termes de bénéfices collectifs ?
Les mécanismes de soutien actuels opèrent sans que leur logique d’impact en termes d’emplois durables, de transition écologique ou sociale soit clairement posée. Un programme de R&D nécessitant l’extraction importante de terres rares situées hors de France sera financé dans les mêmes conditions que celui ayant pour finalité une relocalisation industrielle ou amenant une plus forte sobriété énergétique.
Cadres contraints
Le propos n’est pas ici de suggérer que les innovations portées par les entreprises commerciales seraient intrinsèquement « mauvaises » d’un point de vue sociétal. Plus simplement, leur finalité n’est pas de répondre à des enjeux d’intérêt général. Quand elles ciblent des enjeux sociétaux, ce qui arrive tout de même fréquemment, et heureusement dans des domaines comme la santé ou l’énergie, par exemple, elles le font dans des cadres contraints qui peuvent placer la recherche de lucrativité avant la contribution au bien commun.
Les mécanismes de soutien à l’innovation profitent principalement à des entreprises commerciales dont les démarches de R&D sont centrées sur la mise sur le marché de nouveaux produits et services. Ainsi une société privée commerciale qui travaille sur un dispositif innovant favorisant la bientraitance dans ses établissements d’accueil pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) percevra-t-elle le CIR. Le même programme, s’il est porté par une association ou une collectivité (qui, ensemble, gèrent les trois quarts des Ehpad), ne sera pas aidé au titre du CIR. Il en est de même pour la petite enfance, la santé, le logement, la mobilité, les services de proximité, l’éducation, la culture, le sport, l’alimentation, la transition agricole…
En effet, sont exclus des dispositifs de soutien à l’innovation les associations non fiscalisées, ONG, collectivités, et autres acteurs publics de proximité, dont le cœur d’activité est davantage positionné sur des logiques d’utilité sociale ou d’intérêt général. Pourtant, les associations ont démontré leur capacité à ouvrir de nouvelles perspectives, que l’on songe à l’économie circulaire et au réemploi, à l’économie de proximité, aux services à la personne, à l’éducation populaire, à la protection de l’environnement.
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