Il aura donc fallu huit mois pour que l’analyse cinglante menée conjointement par la Cour des comptes et la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur sur le lancement du plan Marseille en grand, de 2021 à 2023, passe du statut de provisoire à celui de définitif. Pourtant, les critiques contenues dans la première version du rapport, révélée par le site Marsactu en février 2024 et que Le Monde avait pu consulter, n’ont guère été modifiées pendant cette période dite « contradictoire ». Huit mois durant lesquels la situation politique du pays a été bouleversée, fragilisant l’avenir d’un plan qui doit presque tout à la volonté du président de la République.
Rendu public lundi 21 octobre par la présidente de la chambre régionale, Nathalie Gervais, ce rapport interjuridictionnel estime toujours que le contenu, les méthodes de mise en œuvre et les objectifs de Marseille en grand « sont insuffisamment formalisés et partagés par les différents acteurs ». Un plan sans calendrier précis, ne répondant à aucune échéance qui permettrait une évaluation régulière, et dont le seul texte directeur reste, encore, le discours de lancement d’Emmanuel Macron le 2 septembre 2021 à Marseille.
Malgré les modifications apportées par l’Etat, « l’organisation retenue apparaît lacunaire et n’apporte pas de garantie quant à la mise en œuvre effective et rapide des actions du plan », soulignent les magistrats. Qui révèlent un chiffre édifiant : fin 2023, les sommes réellement décaissées par l’Etat se limitaient à 1,31 % des presque cinq milliards d’euros annoncés, soit soixante-douze millions.
« Absence d’instance de gouvernance d’ensemble »
Si la Cour des comptes prévoit des « monographies » sur l’éducation, la mobilité et le logement, volets principaux de Marseille en grand, pour 2026, elle en relève déjà les lacunes. Concernant l’éducation, elle estime que le plan n’intègre « aucune mesure spécifique visant à répondre aux causes de l’échec scolaire ». Pour les transports publics, elle confirme que certains des quinze projets choisis pour recevoir l’aide de l’Etat « ne répondent pas aux priorités définies » par ce dernier et notamment le désenclavement des quartiers nord. Côté logement, le rapport note que les mesures ne portent que sur la résorption de l’habitat dégradé.
Enfin, en bons gendarmes des finances publiques, les magistrats rappellent que la réforme des relations financières entre la métropole et ses quatre-vingt-douze communes n’a pas été engagée, alors qu’elle était une des « conditions prioritaires » de l’aide de l’Etat. Selon la chambre régionale des comptes, le montant des attributions de compensation « versées par la métropole [Aix-Marseille-Provence] aux communes sur des bases irrégulières atteint 178,47 millions d’euros par an ». Des attributions que Martine Vassal, la présidente divers droite de la métropole, refuse de réduire.
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