« La dissolution a été inventée pour régler une crise politique, Emmanuel Macron s’en est servi pour en fabriquer une »

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La dissolution prononcée par le président de la République, dimanche 9 juin, rend peu probable la formation d’une majorité entre forces de gouvernement. Pourquoi les électeurs du 7 juillet, date du second tour des élections législatives, désavoueraient-ils ceux du 9 juin ? Il faut donc réfléchir à ce que serait une cohabitation d’Emmanuel Macron avec l’extrême droite.

La France a l’expérience de trois cohabitations. Le gouvernement n’a pas les pleins pouvoirs. L’action gouvernementale bute sur les pouvoirs propres du président. Le premier ministre ne peut faire de référendum ou décider une dissolution, ni commander les armées, ni signer de traité, ni déclencher les pleins pouvoirs de l’article 16 de la Constitution [qui peut être activé en cas de menace grave et immédiate contre les institutions de la République], ni se substituer au président au Conseil européen. Il ne peut promulguer les lois, ni demander une seconde délibération, ni nommer seul les dirigeants de l’administration et de l’armée. Le président reste maître de l’ordre du jour du conseil des ministres.

Pour que les institutions fonctionnent, les deux têtes de l’exécutif ont instauré un rapport de force responsable entre partis de l’alternance démocratique. En 1997, Jacques Chirac président a ainsi obtenu de Lionel Jospin premier ministre ce que Mitterrand président avait imposé à Chirac premier ministre (1986). Un tiers des nominations dans les grands corps ont été réservées au chef de l’Etat. Les Français ont attendu d’eux qu’ils se respectent, respectent les institutions, s’entendent sur la politique étrangère et européenne et sur la défense nationale.

Le gouvernement de cohabitation doit compter avec le Sénat : ses commissions d’enquête mettent en lumière les défaillances de l’exécutif, son travail législatif tend à l’équilibre. Le gouvernement peut ignorer le vote du Sénat en donnant le dernier mot à l’Assemblée nationale. Mais c’est une mauvaise affaire, car le Sénat incarne la France des territoires.

Rupture radicale

Le gouvernement de cohabitation doit respecter l’Etat de droit. Le Conseil d’Etat est consulté sur les projets de loi et de décret. Il peut annuler tout décret portant atteinte aux droits et aux libertés. Le Conseil constitutionnel peut censurer la loi. Le gouvernement doit alors se soumettre. Il ne peut réviser la Constitution sans l’accord du président et du Sénat.

Le premier ministre ne peut pas contourner par un référendum les obstacles que le président, le Sénat ou les plus hautes juridictions mettraient sur sa route : le chef de l’Etat en détient la clé. Et le président ne peut faire de référendum sans la proposition du premier ministre.

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