C’est le paradoxe de l’élection européenne. Ce scrutin intéresse peu les Français, attire un électorat très conscientisé, essentiellement constitué de cadres euroconvaincus vivant dans des métropoles, et son résultat ne dit rien des élections suivantes. Mais tous les partis le savent, le soir du 9 juin, les résultats du vote donneront lieu à une bataille d’interprétation, avec, en ligne de mire, la présidentielle de 2027.
A gauche, chacun affûte ses armes, espérant refaçonner l’espace politique, après l’échec de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes). Parviendra-t-on à s’accorder sur un candidat unique pour 2027 ? Et surtout sur un programme commun ? Quel en sera le centre de gravité ?
A trois ans de l’élection suprême, nombreux sont ceux à vouloir profiter du scrutin européen pour remettre en cause l’hégémonie revendiquée par Jean-Luc Mélenchon, jugé incapable d’emmener la gauche au pouvoir. Preuve que la menace est concrète, l’ancien sénateur socialiste, « en retrait mais pas en retraite », a commencé à installer les digues, soucieux de contrer ces ambitions.
Velléités putschistes
Bien qu’il s’en défende, le triple candidat à la présidentielle, âgé de 72 ans, n’a pas renoncé à un quatrième tour de piste. C’est d’ailleurs sans convaincre, surtout pas ceux qui le connaissent de longue date, qu’il promet souhaiter « être remplacé ». D’autant qu’il nuance, en s’incluant dans les « hypothèses » pour 2027.
Première étape, éviter un échec cuisant de la liste de La France insoumise (LFI) à l’élection européenne. Le vieux routier de la politique s’est lancé à corps perdu dans la bataille, s’imposant à la dernière place de la liste, une position non éligible, mais symbolique, et faisant de ce scrutin « le premier tour de la présidentielle ». « Il veut planter son drapeau et se positionner. Sinon, d’autres vont le faire à sa place », analyse le politologue Rémi Lefebvre.
Une implication à double tranchant pour l’ancien sénateur socialiste, conscient qu’un mauvais score lui serait reproché, voire servirait de prétexte à ses contempteurs. Vétéran éprouvé de la vie politique, il a déjà commencé à distiller l’argumentaire qui expliquerait une défaite. « Faute de liste unique, tout semble jouer contre nous », écrit-il, le 6 février sur son blog. Une façon de renvoyer préventivement la faute sur ses anciens partenaires de la Nupes, qui ont tenu à faire cavalier seul aux européennes.
Pour la suite, Jean-Luc Mélenchon tente déjà de contenir les velléités putschistes, en égrenant une liste de successeurs potentiels. Cette liste, qui varie, selon les époques, met en ce moment sur le même plan la présidente du groupe (LFI) à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, le coordinateur du mouvement « insoumis », Manuel Bompard, et le député de la Somme François Ruffin.
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