Dans la grande réflexion engagée à l’automne 2023 sur la décentralisation, une question restait à trancher : combien coûte le « mille-feuille administratif » aux contribuables français ? Après six mois de travail, le maire (Les Républicains, LR) de Charleville-Mézières, Boris Ravignon, a chiffré l’enchevêtrement des responsabilités et des compétences (entre l’Etat et les collectivités et entre les collectivités locales elles-mêmes) à 7,5 milliards d’euros par an.
C’est le fruit d’une mission confiée début décembre 2023 par le gouvernement à M. Ravignon, qui a officiellement remis son rapport à l’exécutif, mercredi 29 mai. Son travail doit compléter celui, plus général, du député (Renaissance) de l’Oise, Eric Woerth. Le rapport que ce dernier est censé remettre au chef de l’Etat, jeudi 30 mai, vise à formuler des pistes de réforme pour lancer une « nouvelle étape de décentralisation », envisagée par Emmanuel Macron.
Le président de la République considère que la décentralisation fonctionne « cul par-dessus tête » : tout le monde fait tout et les citoyens ne savent plus qui est responsable de quoi. « Toute notre architecture territoriale est à repenser, avait-il considéré en octobre 2023. Parce que, depuis quarante ans, l’idéal de démocratie locale a organisé l’empiètement, la concurrence parfois, la coexistence en tout cas, de collectivités et de l’Etat, parfois des collectivités entre elles, sans que l’écheveau des compétences ne soit réellement tranché. » Une organisation « qui est confuse et coûteuse, et dilue les responsabilités », avait-il déjà pointé dans Le Point, fin août 2023.
Gérer la complexité
Ce coût est donc aujourd’hui établi. Sur les 7,5 milliards d’euros, la plus grande part est assumée par les communes (4,8 milliards). Mais toutes les collectivités sont concernées : les intercommunalités (696 millions d’euros), les départements (355 millions) et les régions (117 millions). Quant à l’Etat, il assume 1,5 milliard d’euros, notamment parce qu’il affecte 16 000 fonctionnaires à la gestion financière locale : il contrôle, encaisse les recettes des collectivités et paie leurs factures. « Le maire n’a quasiment jamais le chéquier », rappelle Boris Ravignon.
Concrètement, ces 7,5 milliards d’euros correspondent essentiellement au temps que des agents territoriaux consacrent à gérer la complexité de l’organisation du « mille-feuille administratif ». Pour étayer l’estimation, l’équipe de Boris Ravignon a demandé, par questionnaire, aux premiers concernés d’évaluer, politique par politique, la charge que représentent toutes ces tâches pour leurs agents. En tout, 226 collectivités, 88 préfectures et services de l’Etat y ont répondu.
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