Un Hexagone monochrome où n’émergent qu’une poignée de poches échappant à l’extrême droite. En récoltant plus de 7,7 millions de voix, dimanche 9 juin, aux élections européennes, la liste menée par Jordan Bardella n’a pas seulement engrangé le deuxième record en nombre de voix recueillies de l’histoire du Rassemblement national (RN), après le premier tour de la présidentielle 2022 (8,8 millions pour Marine Le Pen). Le parti d’extrême droite assoit une domination territoriale qui ne butte plus désormais que sur les grandes villes.
Sans surprise, l’ancien Front national (FN) établit ses meilleurs résultats au cœur de ses deux lignes de force géographiques historiques : dans le quart nord-est et sur les bords de la Méditerranée. Du Pas-de-Calais à la Haute-Saône, douze départements ont porté le RN à plus de 40 %, l’Aisne lui offrant même plus de la moitié des suffrages exprimés (50,6 %). Aucun n’avait porté l’organisation fondée par Jean-Marie Le Pen à un niveau si haut en 2019, lors des précédentes élections européennes. N’échappant pas à la percée générale du mouvement dans ce scrutin, ces terres – depuis longtemps perméables à sa version social-populaire – enregistrent chacune une augmentation de près de 10 points de la liste frontiste en cinq ans.
Dans le Sud, zone plus sensible au versant identitaire du parti, le RN bénéficie de dynamiques similaires. Des Pyrénées-Orientales au Var, en passant par la Corse-du-Sud, six départements ont plébiscité l’équipe de Jordan Bardella à plus de 40 %. Une performance d’autant plus éloquente qu’elle est réalisée dans des secteurs où l’ex-FN a fait face, cette année, à un concurrent à l’extrême droite – le parti Reconquête ! d’Eric Zemmour, mené à cette élection par Marion Maréchal –, dont les meilleurs résultats ont été relevés près des côtes de la Méditerranée (9,1 % dans les Alpes-Maritimes ; 8,8 % dans le Var). En outre-mer, l’attrait du RN à Mayotte ne s’est pas démenti, quatorze des dix-sept communes du département plaçant la liste de Jordan Bardella au-dessus des 50 %.
Impossible, au lendemain du scrutin européen, de tirer des enseignements définitifs sur les perspectives qui s’ouvrent au RN lors des élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet, convoquées après la dissolution de l’Assemblée nationale prononcée dimanche par Emmanuel Macron. Les résultats du 9 juin affermissent cependant certains gains territoriaux engrangés par les nationalistes en 2022, lors du dernier renouvellement du Palais-Bourbon. Dans l’Eure, où le RN avait décroché quatre des cinq députations il y a trois ans, le parti totalise 42,6 % aux européennes (contre 31,6 % en 2019). Des confirmations du même ordre peuvent être isolées dans l’Aude (40,5 % contre 31,2 %), le Lot-et-Garonne (38,6 % contre 29,4 %) et le Tarn-et-Garonne (38,6 % contre 29,7 %).
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