L’enseignement supérieur français est-il un bien comme les autres ? C’est l’une des questions au centre du rapport parlementaire sur l’enseignement supérieur privé à but lucratif, réalisé par Estelle Folest, députée du Val-d’Oise du MoDem, et Béatrice Descamps, députée du Nord du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires. Présenté mercredi 10 avril devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, le rapport part du constat qu’alors que le secteur privé lucratif occupe désormais une part significative dans l’offre de formations du supérieur – on estime qu’un étudiant sur dix serait concerné –, il reste un acteur méconnu et soumis à de nombreuses « dérives ».
En 2024, plus d’un quart des étudiants suivent leurs études supérieures dans un établissement privé, une part qui n’était que de 15 % dans les années 1990-2000. L’enseignement supérieur privé englobe des réalités très diverses : aux établissements traditionnels – comme les écoles de commerce ou d’ingénieurs, qui ont des liens forts avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche qui les évalue et les contrôle – s’ajoutent de nouveaux acteurs, appartenant au secteur à but lucratif. Des formations, elles aussi, hétérogènes, mais pour la plupart « professionnalisantes ».
Au cours de leurs travaux, les rapporteures se sont heurtées à une première difficulté : l’impossibilité de définir et de chiffrer concrètement ce que représentait ce secteur dans l’offre de formation dans le supérieur, en raison d’un manque de données publiques. Elles préconisent d’établir une définition officielle de l’enseignement privé à but lucratif et de construire une cartographie des établissements concernés.
Confusion entretenue
Elles soulignent aussi le manque de transparence et de lisibilité de ces formations sur leur reconnaissance. La plupart ne relèvent non pas de diplômes du ministère de l’enseignement supérieur, mais de « titres » inscrits au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), piloté par le ministère du travail. « Or, l’obtention d’une certification RNCP ne garantit ni la poursuite d’études ni l’accès aux bourses sur critères sociaux, ce dont trop peu d’étudiants sont conscients », déplore Béatrice Descamps, qui rappelle que les établissements « jouent aisément » sur cette confusion pour attirer des candidats.
Les deux rapporteures insistent sur la nécessité de clarifier les informations sur la plate-forme Parcoursup en créant une « carte d’identité des formations ». Les écoles auraient l’obligation d’y indiquer leur statut juridique et le type de diplôme qu’elles délivrent. « Les étudiants auront ainsi accès à l’ensemble des formations et pourront faire des choix éclairés », précise Mme Descamps, alors que les députées mettent en garde contre les dérives de ce nouveau marché. Celles-ci vont de l’information mensongère sur le contenu d’une formation à l’escroquerie, en passant par les litiges financiers sur les frais de scolarité.
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