« Les jeunes et la guerre », sociologie d’une génération

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Pour la première fois depuis le début du conflit ukrainien, en février 2022, une étude sociologique, menée sur « les jeunes et la guerre », doit être rendue publique, vendredi 12 avril, à Sciences Po, à Paris. Une enquête, réalisée par la spécialiste de la jeunesse Anne Muxel, chercheuse émérite au CNRS et directrice déléguée au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), qui confronte le regard des jeunes aux perspectives concrètes de la guerre.

Menée pour le compte de l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire et la direction générale des relations internationales et de la stratégie – deux entités rattachées au ministère des armées –, cette étude, réalisée entre février et décembre 2023, passe au crible l’ensemble des facettes du rapport aux armées des jeunes Français. Depuis leurs représentations des guerres actuelles et futures à l’influence de leur entourage familial, de l’école et des jeux vidéo, jusqu’à questionner, de manière détaillée, leur volonté d’engagement et de résilience en cas de conflit.

En complément de ses années de travail sur les relations entre les jeunes et les armées, Anne Muxel s’appuie, dans son étude, sur un sondage réalisé par l’Ipsos, auprès d’un échantillon représentatif de 2 301 jeunes âgés de 18 à 25 ans. Ce sondage – dont elle a conçu le questionnaire – a été réalisé en ligne, entre juin et juillet 2023, soit plus d’un an après le début de la guerre en Ukraine, mais avant l’échec de la contre-offensive et les perspectives actuelles très pessimistes.

« Disparition de l’antimilitarisme »

Les résultats n’en sont pas moins révélateurs d’une évolution sensible du regard des jeunes sur l’engagement militaire, estime Mme Muxel. S’il y a régulièrement eu, ces dernières années, des enquêtes mettant en exergue leurs relatives bonnes dispositions à l’égard des armées, selon les résultats obtenus cette fois-ci, un nouveau cap est franchi : plus de 51 % des jeunes sondés se disent désormais « prêts » ou « peut-être prêts » à s’engager « si la protection de la France nécessitait que le pays s’engage dans la guerre en Ukraine », même si seulement 17 % d’entre eux se déclarent certains de ce choix, détaille-t-elle.

Cette adhésion globale à un engagement militaire grimpe, par ailleurs, à 57 % quand les jeunes sont interrogés sur leurs dispositions à rejoindre les rangs de l’armée « en cas de guerre », sans préciser le contexte ukrainien. Des chiffres qui recoupent ceux recueillis par l’Ipsos, lors d’une enquête d’opinion effectuée en février 2023, où les moins de 35 ans apparaissaient déjà « nettement plus favorables » à l’envoi, par la France, de troupes en Ukraine, contre 17 % des 50 ans et plus, rappelle Mme Muxel dans son enquête. Cet ensemble d’indicateurs confirme un « regain de patriotisme », qui « dépasse les seules frontières nationales et convoque un altruisme moral, référentiel des répertoires d’engagement des jeunes d’aujourd’hui », résume-t-elle. Ils corroborent aussi, selon elle, « la disparition de l’antimilitarisme qui prévalait, auparavant, chez les jeunes générations » du fait de la conscription.

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