« L’instabilité en Nouvelle-Calédonie, que l’Etat n’a pas bien mesurée, représente une aubaine pour certains pays »

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Surnommée « le Caillou », la Nouvelle-Calédonie détient en son sol près de 15 % des réserves mondiales de nickel. Au sein de la Ve République, elle bénéficie aussi d’une situation unique, sui generis, issue de l’Accord de Nouméa du 5 mai 1998. Ce processus de décolonisation sans indépendance, selon son initiateur le premier ministre Michel Rocard [1988-1991], a permis une large autonomie de l’île et devait aboutir par voies référendaires, comme le dit l’Accord, « à une pleine souveraineté », dans un nouveau statut consensuel, vingt-quatre ans après. Or, s’il a respecté à la lettre l’Accord de Nouméa, le référendum – boycotté en 2021 par les indépendantistes – en a rendu caduque l’esprit.

A cette crise politique, s’ajoute le déséquilibre du modèle économique masqué jusqu’ici par l’apport de larges flux financiers issus des investissements privés dans les usines métallurgiques et des interventions de l’Etat. En l’absence de nouveaux transferts, ce système est aujourd’hui au bord de l’effondrement. La crise des métaux, liée à la transition énergétique, a poussé le géant Glencore, actionnaire clé de Koniambo Nickel SAS, à mettre en sommeil son usine du nord de l’île, en attendant un hypothétique repreneur. Dans le Sud, le désengagement annoncé par la PDG d’Eramet, Christel Bories, de l’usine SLN de Doniambo et le projet orphelin de Prony Ressources NC – qui vient d’obtenir un crédit de trésorerie par l’Etat pour tenir jusqu’en fin d’année –, amorcent leurs lentes agonies. L’enlisement de ces trois entreprises menace la métallurgie locale et fait à terme planer un risque de désindustrialisation pour le Caillou

Or l’industrie du nickel représente une part écrasante dans la balance commerciale de la Nouvelle-Calédonie, fortement déficitaire. Son rôle sur tout le territoire dans l’emploi direct et indirect, hors administration, est dominant, si bien que son impact sur le PIB pèse pour près de 20 % en valeur. Avec ce pan de l’activité économique à l’arrêt, c’est tout le système local qui est grippé, avec pour conséquence l’insolvabilité des caisses d’assurance-chômage, maladie, retraite, mais aussi celle des collectivités locales.

Lire l’éditorial du « Monde » | L’avenir de la Nouvelle-Calédonie reste à inventer

Cela concerne aussi la collectivité Nouvelle-Calédonie, dont l’organisation institutionnelle lui a donné le mauvais rôle : prélever impôts et taxes et en distribuer la recette principalement aux provinces. Ces dernières ont beau jeu de les dépenser sans compter, permettant d’asseoir un pouvoir financier doublé de compétences larges et variées données dans le cadre de la loi organique de 1999 (comme la protection de l’environnement, le développement économique et notamment la gestion des ressources minières, l’attribution des titres miniers, etc.).

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