Mardi 9 avril au matin, des centaines de manifestants ont investi la sous-préfecture de Saint-Laurent-du-Maroni après avoir brisé le cadenas fermant la grille entourant le bâtiment. Environ sept cents personnes étaient rassemblées depuis le début de la matinée, devant l’édifice, pour réclamer un renforcement des mesures contre l’insécurité. Elles ont attendu plusieurs heures l’arrivée sur place de la sous-préfète – en hélicoptère – pour entamer une réunion de crise.
A l’origine de la manifestation, le meurtre la veille dans la commune d’Hélène Tarcy-Cétout, une pharmacienne guyanaise de trente-quatre ans, treizième homicide en Guyane depuis le 1er janvier 2024. L’auteur présumé, un homme d’une trentaine d’années, a été appréhendé par des passants, puis interpellé par les gendarmes.
Hélène Tarcy-Cétout sortait d’une cafétéria pour aller ouvrir l’officine où elle assurait un remplacement, quand elle a été tuée à coups de couteau pour des motifs encore inexpliqués. « Elle s’était arrêtée là pour prendre un café, il ne lui a laissé aucune chance », lâche Liliane Pognon, co-présidente du syndicat des pharmaciens de Guyane. « On est encore dans l’effroi, la stupéfaction, l’horreur », ajoute-t-elle.
Lundi, les officines de Guyane ont fermé leurs portes en signe de solidarité. Dans un communiqué, Sophie Charles, maire de Saint-Laurent-du-Maroni, évoque « la perte d’une femme lumineuse (…) qui avait tant à offrir à notre communauté », et Gabriel Serville, le président de la Collectivité territoriale de Guyane, un « sens de l’engagement peu commun ».
« Pleine de vie et de projets »
La personnalité et le rayonnement social de la victime ont amplifié le choc dans la société guyanaise. Mère de quatre enfants, elle était sapeur-pompier volontaire et faisait partie des lauréates du concours national « 101 entrepreneures » reçues le 8 mars à Matignon par le premier ministre Gabriel Attal, pour un projet dans le domaine du bien-être dédié aux femmes. Hélène Tarcy-Cétout était de retour en Guyane depuis un an, après avoir étudié et travaillé dans l’Hexagone. « Elle était pleine de vie et de projets, elle voulait créer une grande pharmacie moderne à Saint-Laurent », précise Liliane Pognon.
Mardi soir, l’auteur présumé de l’homicide était toujours en garde à vue. Il s’agit d’un sans domicile fixe né en Guyane, ayant déjà fait un séjour en détention. « Depuis fin 2023, il y a de plus en plus d’agressions chez les habitants ou dans les commerces avec des armes, mais là, on est arrivé à un autre niveau… Nous posons la question aux autorités : jusqu’où va-t-on aller ? » interroge Gilbert Dolloue, porte-parole du collectif « Positif Soholang Pikin », « les natifs positifs de Saint-Laurent », en langue ndjuka, l’un des peuples bushi-nengue descendant des « noirs marrons » du Suriname – des esclaves ayant fui les plantations coloniales.
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