« Une bonne performance électorale de l’extrême droite pourrait contrarier l’essence même du projet européen »

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Alors que les citoyens se rendent aux urnes dans les vingt-sept Etats membres, l’incertitude plane sur le continent. Pour la première fois, les partis d’extrême droite et antiestablishment pourraient obtenir environ un quart des sièges au Parlement européen. Ces mêmes partis gouvernent déjà à différents niveaux de pouvoir dans plus d’une douzaine d’Etats membres de l’Union européenne [UE].

Parmi ceux-ci figurent certains Etats fondateurs, tels que l’Italie et les Pays-Bas, où ils ont progressivement acquis une respectabilité auparavant inconcevable. Bien que cette normalisation n’ait pas encore eu lieu au niveau de l’UE, elle risque de se produire. Mais il est probable qu’elle se déroule différemment qu’au niveau national, en raison de certaines caractéristiques structurelles et politiques propres à l’Union.

Tout d’abord, la personne qui présidera la Commission européenne, ainsi désignée par les chefs d’Etat et de gouvernement réunis au sein du Conseil, n’est pas légalement tenue de former une majorité politique clairement définie avant le vote du Parlement européen confirmant sa nomination. De même, les députés nouvellement élus ne sont pas censés choisir un camp avant les élections, et même si leurs propres partis politiques leur demandent de le faire, ils voteront à bulletin secret.

C’est la raison pour laquelle, en 2019, Mme von der Leyen, présidente de la Commission européenne, n’a pas réussi à obtenir les suffrages de tous les eurodéputés des partis traditionnels qui la soutenaient, recevant, en revanche, les voix de ceux qui n’étaient pas censés la soutenir, comme le parti Droit et justice polonais et les Italiens du Mouvement 5 étoiles. Par conséquent, la prochaine Commission européenne ne s’appuiera pas sur une majorité stable, mais plutôt sur une majorité à géométrie variable se définissant au sein du Parlement en fonction des dossiers qui y seront débattus. Le choix de la présidence de la Commission sera déterminé par la capacité du candidat à former une telle majorité.

Groupes idéologiquement hétérogènes

Deuxièmement, le Parlement européen n’est ni « européen » ni un véritable Parlement. Il n’est pas européen dans la mesure où ses membres appartiennent à des partis politiques nationaux – et non européens. Bien que les nouveaux députés puissent rejoindre des groupes politiques une fois élus au sein du Parlement européen, ces groupes sont idéologiquement hétérogènes, et ne peuvent pas garantir un soutien politique permanent à une Commission donnée tout au long d’une législature. En outre, le Parlement européen n’est pas non plus un véritable Parlement, car il ne dispose pas d’initiative législative, qui appartient à la seule Commission européenne.

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