l’opposition entre mobilisation et crainte de répression

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Depuis l’adoption de la nouvelle Constitution, qu’elles dénoncent, l’opposition et la société civile togolaises sont déchirées entre désir de mobilisation et crainte de répression, à quelques jours des élections législatives. « Il ne faut pas attendre grand-chose des élections », a déclaré lundi 22 avril sans ambiguïté à l’Agence France-Presse (AFP) Jean Yaovi Degli, avocat et ancien ministre chargé des relations avec le Parlement (1991-1992), ajoutant que « le parti au pouvoir n’a rien à craindre ».

Si les partis d’opposition continuent de faire campagne avant le double scrutin législatif et régional du 29 avril, les espoirs d’une transition politique sont minces. « Une victoire de l’opposition serait très difficile à moins d’une révolution », a confié à l’AFP l’historien proche de l’opposition Michel Goeh-Akue, qui souligne que « le découpage électoral est favorable au régime » et les risques de « bourrage d’urnes » importants.

La Commission électorale togolaise a refusé à la Conférence épiscopale du Togo de déployer des observateurs électoraux à travers le pays, selon un document consulté par l’AFP. Vendredi 19 avril, le Parlement a adopté une nouvelle Constitution qui a fait basculer le pays d’un régime présidentiel à un régime parlementaire.

Le président sera élu par les députés, et non plus par le peuple, et le pouvoir résidera désormais entre les mains d’une sorte de super-premier ministre qui sera obligatoirement « le chef du parti majoritaire » à l’Assemblée nationale.

« Source de division et d’incompréhension »

Or, le président du parti majoritaire à l’Assemblée, l’Union pour la République (UNIR), n’est autre que le président Faure Gnassingbé, a la tête de l’Etat depuis 2005 après avoir succédé à son père, qui a tenu les rênes du pays d’une main de fer pendant près de trente-huit ans. Et qui va ainsi pouvoir se maintenir au pouvoir, dénonce l’opposition.

Le président de la Conférence épiscopale, Mgr Benoît Alowonou, a exprimé mercredi dans un entretien à Radio Vatican sa « grande tristesse » face à cette modification constitutionnelle, qu’il voit comme une « source de division et d’incompréhension », et a appelé les autorités « à écouter le peuple ».

Mardi, une quinzaine d’organisations de la société civile ont signé une déclaration soulignant le caractère « illégitime » et « illégal » du changement constitutionnel, et réclamé « une élection présidentielle en 2025 ».

Ils appellent à un grand rassemblement populaire le 5 mai à Lomé, une date symbolique qui se réfère au 5 mai 1963, jour du référendum constitutionnel qui a fait passer le pays d’un régime semi-présidentiel à un régime présidentiel à la suite du coup d’Etat de Gnassingbé Eyadéma, père de l’actuel président. « Nous avons décidé de résister, mais il est clair qu’il n’y aura pas grand-chose, car tout est fait pour réprimer toute velléité de protestation », a admis Michel Goeh-Akue.

Peu de réactions internationales

Au Togo, les manifestations de rues sont interdites depuis 2022, après une attaque au grand marché de Lomé au cours de laquelle un gendarme a été tué. Deux journées de manifestations prévues les 12 et 13 avril par l’opposition et des groupes de la société civile pour protester contre la nouvelle Constitution n’ont pu avoir lieu : elles ont été interdites par les autorités, et les membres de l’opposition empêchés de se regrouper.

La semaine dernière, un journaliste français, Thomas Dietrich, connu pour ses positions critiques envers les autorités, a été expulsé peu après son entrée au Togo, une mesure dénoncée comme « brutale et arbitraire » par l’ONG de défense de la liberté de la presse Reporters sans frontières (RSF). Le 15 avril, la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC) avait suspendu à titre provisoire toutes les accréditations délivrées à la presse étrangère pour couvrir les élections.

A l’étranger, seul le bureau des affaires africaines du département d’Etat des Etats-Unis s’est dit « inquiet » de ce changement de Constitution et a demandé « au gouvernement de permettre un débat ouvert et informé, de garantir l’inclusivité et la transparence et de respecter le droit de réunion pacifique ».

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La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a de son côté dépêché la semaine dernière une mission à Lomé. Mais, après avoir évoqué dans un premier temps la « gravité des réformes constitutionnelles controversées », elle a expliqué qu’elle n’y effectuait qu’« une évaluation préélectorale » et ne s’engagerait « dans aucun autre processus ». Depuis, elle n’a pas communiqué sur le bilan de sa visite.

Le Monde avec AFP

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