Au lendemain d’une nuit d’émeute et du vote du projet de loi constitutionnelle modifiant le corps électoral pour les élections provinciales de fin 2024, les oppositions prenaient la mesure du désastre, mercredi 15 mai, chacune à leur manière. Au risque d’en faire un sujet de pure politique nationale, gauche et droite se scindent selon des blocs attendus. Du côté de la droite et de l’extrême droite, qui ont voté le projet de loi constitutionnelle, c’est la demande de rétablissement immédiat de l’ordre qui prévaut. La gauche réclame, quant à elle, le retrait ou la suspension du texte, l’abandon définitif d’un congrès à Versailles, considéré comme néfaste au dialogue, et s’indigne des conséquences d’un « passage en force ».
Dès le matin, sur Franceinfo, le président du groupe Les Républicains (LR) au Sénat, Bruno Retailleau, appelait « l’Etat à se saisir des outils d’autorité qui permettent de rétablir l’ordre public » et puisait dans le lexique gaullien pour dire qu’« il ne peut pas y avoir de dialogue dans la chienlit ». Plus discrète, la cheffe de file des députés du Rassemblement national, Marine Le Pen, qui n’a pas pris la parole dans l’Hémicycle mardi soir, a demandé sur le réseau social X la proclamation de l’état d’urgence, étant donné « la gravité des violences ». Sénateur LR de Nouvelle-Calédonie, Georges Naturel a salué au Sénat la proclamation de l’état d’urgence, rendant hommage au gendarme mort mercredi, qui a, dit-il, « payé au prix de sa vie la défense de la République ».
De gauche à droite, tous appellent le premier ministre, Gabriel Attal, à s’emparer du dossier néo-calédonien – jusqu’alors confié au ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin –, à l’instar de plusieurs de ses prédécesseurs, notamment les socialistes Michel Rocard et Lionel Jospin, artisans respectifs des accords de Matignon de 1988 et des accords de Nouméa en 1998, ou encore Edouard Philippe, dernier locataire de Matignon à s’être saisi de la question. « Ce dossier ne devait pas quitter le bureau historique du PM [premier ministre], allez-vous enfin vous engager personnellement, allez-vous enfin vous rendre en Nouvelle-Calédonie ? », a lancé, lors de la séance des questions au gouvernement, le président du groupe socialiste au Sénat, Patrick Kanner.
« Retour aux armes des colonisateurs »
A l’Assemblée nationale, après avoir défendu dans la nuit le retrait du texte, Jean-Victor Castor, député (Gauche démocrate et républicaine, GDR) de Guyane, a mis en cause la responsabilité du gouvernement dans les violences. « Le pire est arrivé. En Nouvelle-Calédonie, il y a maintenant des morts. On savait tous que ce risque était majeur et pourtant, malgré tous nos appels au retrait, vous avez voulu aller au bout de cette démarche », a-t-il lancé à Gabriel Attal, lors des questions au gouvernement.
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