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« Si le président Ghazouani avait perdu, il l’aurait accepté », assure le chef de la diplomatie mauritanienne

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Le scénario de 2019 s’est donc répété. Sitôt après la publication des premiers résultats du vote du 29 juin dernier, donnant Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani vainqueur, son principal rival Biram Dah Abeid a dénoncé un « hold-up électoral. » Le 4 juillet, la victoire du président sortant avec 56,12 % des voix a toutefois été confirmée par le Conseil constitutionnel, tandis que le populaire leader antiesclavagiste était crédité de 22,10 % des suffrages. Le scrutin, qui opposait six candidats, se résumait en réalité à un duel entre les deux hommes.

À Nouakchott et Nouadhibou, des échauffourées ont conduit à des arrestations et à Kaédi, dans le sud du pays, trois personnes sont décédées à la suite d’émeutes. « Tous les citoyens » arrêtés ont été libérés, a précisé le 8 juillet le ministère de l’Intérieur, dirigé par Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine, dans un communiqué, assurant que « la situation sécuritaire est revenue à la normale. » Mais, en l’absence d’autre communication officielle, des questions restent en suspens. Prudentes, les autorités mauritaniennes réagissent en effet rarement à chaud.


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Pour Jeune Afrique, le ministre des Affaires étrangères, Mohamed Salem Ould Merzoug, a choisi de s’exprimer sur la situation postélectorale. Ce proche collaborateur du chef de l’État fut d’abord son ministre de l’Intérieur, de 2019 à 2022, avant de prendre la tête de la diplomatie. Un poste d’autant plus stratégique que le pays préside actuellement l’Union africaine. Entretien.

Jeune Afrique : Comment expliquez-vous le fait que, comme en 2019, les troubles post-électoraux n’aient pu être empêchés ?

Mohamed Salem Ould Merzoug : Toutes les leçons du scrutin de 2019 ont été tirées et aucune comparaison n’est possible entre les deux situations. En effet, le président de la République a, durant tout son mandat, fait de l’apaisement une constante de sa politique et du dialogue, un principe de son action. Dès les premiers mois, il a ouvert ses portes à tous les acteurs et leaders des partis politiques et de la société civile, toutes obédiences et trajectoires confondues, afin d’ouvrir de nouvelles perspectives à notre jeune démocratie.

Rappelez-vous, à l’époque, les Mauritaniens ne s’écoutaient plus. Il a réaffirmé à chacun son souhait de traiter toutes les questions participant à la consolidation de la concorde nationale, sans tabou. En septembre 2022, tous les partis politiques ont signé un accord, qui porte sur des réformes relatives au code électoral, à la confection d’un nouveau fichier électoral et à la création d’une nouvelle Commission électorale nationale indépendante [Ceni], désignée paritairement et donnant des garanties sur la transparence et la crédibilité des scrutins.


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Les 10, 11 et 12 mars derniers ont été organisées des journées nationales de concertation sur la préparation de l’élection présidentielle et la promotion de la gouvernance politique, auxquelles ont pris part tous les partis politiques, y compris ceux qui ne sont pas reconnus. Les mandataires des candidats, associés à chaque étape, n’ont relevé aucun dysfonctionnement. Par ailleurs, ces représentants ont été transportés et pris en charge par la Ceni pour assurer la représentation de tous les candidats dans tous les bureaux de vote.

Mais les résultats ont, malgré tout, été contestés par l’opposition…


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Les dépouillements ont été faits en présence des représentants des bureaux de vote qui ont signé les procès-verbaux de dépouillement et en ont pris copie. La proclamation des résultats par la Ceni a été appuyée par la mise en ligne de ces mêmes procès-verbaux, permettant ainsi à tout un chacun de les visualiser et de vérifier le décompte des voix.

Tous les candidats, à l’exception d’un seul, ont témoigné de la transparence et de la crédibilité du scrutin présidentiel.

Tous les candidats, à l’exception d’un seul, ont témoigné de la transparence et de la crédibilité du scrutin présidentiel. Cela est si évident qu’aucun recours n’a été déposé devant le Conseil constitutionnel. En dépit de cela, nous constatons avec étonnement des contestations des résultats, contestations du reste non étayées par un minimum de preuves matérielles. Je peux vous affirmer que c’est aussi l’avis des observateurs internationaux qui ont fait leur travail en toute indépendance.

Si les scores n’avaient pas été favorables au président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, aurait-il accepté une défaite ?

Absolument. Il a publiquement déclaré, lors d’un meeting électoral, qu’il serait le premier à féliciter le vainqueur et à lui tendre une main fraternelle. Et, c’était vraiment sincère et courageux parce qu’il a pris à témoin tout le peuple mauritanien.

Peu d’informations ont filtré sur les récents événements post-électoraux. Le 8 juillet, le ministre de l’Intérieur a indiqué que « tous les citoyens » arrêtés ont été libérés, sans donner de chiffres. Or, Biram Dah Abeid a évoqué l’arrestation de 1 500 de ses partisans. 

Je veux d’abord attirer l’attention sur le fait que les récents événements sont connus de tous. Le ministère de l’Intérieur a régulièrement informé l’opinion publique par voie de communiqués sur la situation. Ensuite, il n’y a pas eu à proprement parler d’arrestations.

Il s’est plutôt agi d’interpellations lors d’opérations de maintien de l’ordre, ou bien de personnes soupçonnées d’avoir participé ou incité à des actes de violence. L’objectif était de prendre des mesures pour sauvegarder l’ordre public et la protection des personnes et des biens. Toutes les personnes interpellées ont été libérées après avoir été entendues par la police.

La présence policière s’est fortement accrue à Nouakchott. Fallait-il nécessairement répondre à la contestation par la force ?

Le dispositif sécuritaire mis en place dans la capitale est sans commune mesure avec celui déployé en 2019. Il est préventif et n’a donc pas vocation à répondre à la contestation par la force. Il y a eu quelques interventions, oui, mais en réponse à des actes de violences visant des personnes et des biens.

Le ministre de l’Intérieur évoque également des « étrangers » impliqués dans les violences. De qui parle-t-on ?

La Mauritanie est un pays ouvert et accueillant. Nous comptons de nombreuses communautés étrangères bien intégrées chez nous, notamment des Ouest-Africains. Malheureusement, certains individus ont été interpellés lors d’actions violentes exercées par des manifestants.

Officiellement, il y a eu trois morts à Kaédi, mais des organisations de la société civile évoquent le double, voire plus. 

Il y a malheureusement eu des morts à Kaédi, c’est un fait déplorable. Il est vraiment malsain de se lancer dans une sorte de surenchère sur les chiffres, car pour nous, un mort est toujours un mort de trop. L’État a été très transparent sur cette question en donnant le nombre exact de personnes décédées, en remettant les dépouilles à leurs parents, en présentant les condoléances aux familles éplorées et en mettant en place une commission d’enquête. Vous savez, dans notre pays, tout le monde connaît tout le monde. Et il est impossible de dissimuler le nombre de morts.

Dans notre pays, tout le monde connaît tout le monde. Et il est impossible de dissimuler le nombre de morts.

Dans quelles circonstances sont-ils décédés ?

Encore une fois, une commission d’enquête a été mise en place et la justice a été saisie. Tout se saura et en toute transparence, dès que les conclusions seront rendues publiques.

Ces événements se sont déroulés à Kaédi, ce sont donc des Mauritaniens noirs qui ont été visés. Une partie de la société civile et des associations accusent les autorités de racisme. Que répondez-vous ?

Je me demande s’il ne s’agit pas d’un procès en sorcellerie. Parce qu’il est évident que les manifestants d’une ville sont le reflet de sa composition socio-ethnique. Et tout le monde sait que seuls les émeutiers étaient visés.

Pourquoi la direction du Front pour le changement, le parti de l’ex-président Mohamed Ould Abdelaziz, a-t-elle été arrêtée ?

Tous les membres de la direction de cette organisation non reconnue ont été libérés sans exception. Nous ne cherchons pas à tout judiciariser, mais à apaiser sans concession pour la sécurité et l’ordre public.

Quelles seront les premières mesures du président officiellement réélu ?

C’est au président de la République d’en décider. Mais il a fixé le cap de son prochain quinquennat : la jeunesse. Une gouvernance rénovée et vertueuse sera mise en place. L’offre et la qualité du service public seront des préoccupations constantes. La sécurité, la stabilité et le dialogue seront les maîtres-mots de ce mandat.

Continuera-t-il à dialoguer avec Biram Dah Abeid ?

Le dialogue politique est une constante du discours et de l’action du président. Il l’a réaffirmé avec beaucoup de conviction dans son programme électoral, et aussitôt les résultats proclamés par la Ceni. Son projet de société est de garantir au pays progrès et prospérité, dans un climat de paix et de quiétude, autour d’institutions démocratiques et de valeurs républicaines.

Nous avons la conviction que notre avenir est à portée de main et notre responsabilité collective est de lui donner corps, ensemble, en consolidant et régénérant notre système démocratique, en luttant contre les inégalités et en préservant l’unité et la cohésion nationales dans un espace, où la justice sociale et l’équité territoriale seront assurées. C’est à cet espoir, porté par une majorité des citoyens mauritaniens, que nous sommes très attachés.

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