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les marchés ont les yeux rivés sur Jackson Hole

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Jackson Hole. Pour les amateurs de descente, c’est une station de ski du Wyoming, dont les pistes font partie des plus raides des États-Unis. Pour les passionnés de nature, c’est une vallée nichée à 2 000 mètres d’altitude, dans laquelle se cache un paradis de la pêche. Pour les financiers et les économistes, c’est le rendez-vous incontournable de la rentrée.

Depuis 1982, les banquiers centraux organisent là-bas leur grand raout annuel à la fin du mois d’août. La légende dit d’ailleurs que le lieu n’aurait pas été choisi au hasard, Paul Volcker, patron de la Réserve fédérale américaine (Fed) de 1979 à 1987, étant un grand amateur de pêche à la mouche…

Lors de ce symposium, qui se tiendra cette année du 22 au 24 août, les grands argentiers de la planète et quelques invités triés sur le volet – universitaires, financiers ou représentants du monde politique – discuteront d’enjeux liés à la politique monétaire et à la conjoncture économique. Cette année, le thème de ces conversations d’experts sera le très académique « Réévaluer l’efficacité et la transmission de la politique monétaire ». Pour les non-initiés, la formule pourrait paraître obscure. Mais peu importe, car le véritable événement de ce rendez-vous annuel est surtout l’incontournable discours du président de la Fed. Et cette année, les marchés auront à nouveau les écoutilles grandes ouvertes lorsque Jerome Powell s’exprimera.

Changement d’ère

En effet, les banques centrales sont à nouveau en train de changer d’ère. Et comme tout changement de cap de la Fed, la nouvelle direction doit être prise avec beaucoup de précautions pour ne pas provoquer d’accidents sur les marchés. Pour comprendre où nous en sommes, replongeons-nous quelques années en arrière. Souvenons-nous de l’avant-Covid : après le chaos de la crise des subprimes, et celle des dettes souveraines de la zone euro, les banques centrales avaient dû mettre en place des politiques non conventionnelles, car la baisse des taux ne suffisait plus pour combattre le risque de déflation. Mais surtout pour éviter aux États trop endettés de voir leurs coûts de financement s’envoler…

Puis est venu le grand bouleversement du Covid, de la guerre en Ukraine et le retour spectre de l’hyperinflation, cette crainte qui semblait pourtant avoir disparu du paysage depuis des décennies. Après être restés un peu trop longtemps les bras croisés, en estimant que la hausse des prix n’était que temporaire, les banquiers centraux ont finalement mis fin à leurs politiques ultra-expansionnistes et serré le robinet du crédit en remontant les taux. Un succès. Même si l’inflation n’est pas revenue à son niveau d’avant-Covid, le risque d’un dérapage est désormais éloigné… et la phase de normalisation de la politique monétaire peut commencer.

Panique boursière

Oui, mais à quelle vitesse ? La réponse à cette question n’est pas sans conséquence. La panique boursière du début du mois d’août l’a montré. « Elle s’explique notamment par l’intervention de Jerome Powell en juillet : celui-ci a expliqué, et cela a surpris beaucoup d’observateurs, que la Fed avait discuté d’une possibilité de baisser les taux en juillet, alors que tout le monde pensait que la question ne se poserait pas avant septembre, voire les élections américaines », nous expliquait Alexandre Baradez, chef analyste chez IG, il y a quelques semaines

La vitesse de baisse des taux a en effet toute son importance : si la Fed se précipite, le message reçu par les marchés pourrait être celui d’un risque de récession. Mais si la Fed ne va pas assez vite, elle pourrait provoquer elle-même la récession en maintenant l’économie sous pression un peu trop longtemps… Entre les deux risques, Jerome Powell va donc devoir trouver un juste équilibre. Pour le moment, il a plutôt des atouts dans son jeu. « Le contexte de normalisation est plutôt favorable pour les banques centrales, car la conjoncture macroéconomique demeure relativement bonne, ce qui facilite l’atterrissage en douceur », analyse Christopher Dembik, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM.

Baisse des taux

Aujourd’hui, les marchés anticipent une première baisse des taux en septembre. Les yeux rivés sur Jackson Hole, ils chercheront dans les propos de Jerome Powell une confirmation de leurs attentes. « Il n’y aura sans doute pas d’annonces fracassantes, car Jerome Powell a déjà renversé la table en juillet, mais cela sera peut-être pour lui l’occasion de clarifier sa communication », estime Alexandre Baradez. 

Les investisseurs seront sûrement également attentifs aux propos des représentants de la Banque centrale européenne (BCE). Celle-ci a déjà baissé ses taux en juin. Le fera-t-elle à nouveau en septembre ? « La question de ce que nous ferons en septembre est grande ouverte », avait assuré Christine Lagarde pendant l’été. Quelques indices pourront être glissés à Jackson Hole. Mais l’annonce prochaine du gouvernement français, et la réaction des marchés à cette nouvelle donne, pourrait aussi rebattre les cartes.


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