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Macron, le président qui n’arrête pas de signer des chèques

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Deux des trois agences de notation les plus influentes sur les marchés financiers, Fitch Ratings et Moody’s, ont mis à jour leur évaluation de la solvabilité de la dette publique française, le 26 avril. Cette révision de la note financière de la France a lieu tous les six mois. Plus de peur que de mal : la France a échappé à une sanction et les deux agences ont maintenu leurs notations, ainsi que leurs perspectives, inchangées. Standard & Poor’s (S & P), considérée comme l’agence la plus influente de toutes, livrera, quant à elle, son verdict vendredi 31 mai. Avant cette échéance, Le Point vous propose une série en cinq épisodes pour tout comprendre de la situation des finances de la France.

Le « en même temps » du gouvernement n’en finit pas d’agacer. D’un côté, les chiffres alarmants du déficit public – 5,5 % du PIB en 2023 – et une croissance plus morne qu’anticipée – 1 % en 2024, selon Bercy – ont contraint le gouvernement à prendre les choses en main, ou du moins l’ont incité à dire qu’il allait le faire. « Nous faisons un seul choix : le rétablissement des finances publiques. […] Il faut refroidir la machine […] quand on gagne moins, on dépense moins », avait affirmé Bruno Le Maire dans une interview au Monde, le 6 mars.

Au total, Bercy a annoncé 20 milliards d’économies sur le budget de l’année 2024 et 20 milliards d’euros supplémentaires devraient être retirés au budget 2025. Mais, dans le même temps, l’État continue de signer des chèques. Et les montants sont loin d’être négligeables : 650 millions d’euros d’aide à destination des Ehpad, 3 milliards pour l’Ukraine, 400 millions pour les agriculteurs, 500 millions pour les hôpitaux, des millions et des millions d’euros de primes pour les fonctionnaires mobilisés pendant les Jeux olympiques…

Et le dernier en date : le chèque pour la Nouvelle-Calédonie, dont le montant n’est pas encore connu. « Nous sommes un pays où chaque fois qu’il y a un problème, il faut le régler par une dépense publique ou une norme », souligne le spécialiste des finances publiques, François Ecalle.

« C’est le fameux “en même temps” », se désespère l’économiste et président du cabinet Acdefi (Aux commandes de l’économie et de la finance) Marc Touati, qui estime que, finalement, « il n’y aura pas d’économies ». En effet, si la première salve de 10 milliards d’euros a été bien détaillée, le gouvernement n’a pas précisé comment il allait parvenir à économiser les 10 milliards supplémentaires annoncés début avril. Dans une interview à L’Express, le 22 mai, Emmanuel Macron n’en a pas dit plus. Le chef de l’État a en revanche réaffirmé son objectif de « revenir sous les 3 % comme prévu au niveau européen d’ici à 2027 ».

Jusqu’à 160 milliards d’économies

La poursuite de cet objectif nécessiterait pourtant des économies drastiques, mettent en garde de nombreux économistes, la Cour des comptes et la Commission européenne elle-même. « Passer de 5,5 % à moins de 3 % en quatre ans, cela nécessite pratiquement 80 milliards d’euros d’économies », chiffre l’économiste à l’OFCE Mathieu Plane. « Et ils imaginent que cela n’aura pas d’effet sur la croissance ? Ce n’est pas possible ! En gros, quand vous faites 10 milliards d’euros d’économies, ça fait 10 milliards d’euros de PIB en moins. Donc, en intégrant les effets retours sur la croissance, il faudrait doubler la mise à 160 milliards d’euros », estime-t-il.

Une réserve partagée par la Commission européenne, qui a estimé que, dans un avis publié le 15 mai, « les mesures de réduction du déficit annoncées par le gouvernement […] devraient peser sur la croissance ». Le FMI a considéré, le 23 mai, qu’en 2027 le déficit public de la France devrait s’élever à 4,5 % du PIB. Loin, très loin, de l’objectif affiché par Bercy à 2,9 %.

Le ministère, de son côté, se défend toujours de toute erreur de calcul. « Sur l’effet récessif, on ne partage pas du tout cette analyse, répond-on à Bercy. On pense que, en 2025 et en 2026, il va y avoir un fort rebond en France, une forte dynamique de croissance. Notre stratégie est claire : on veut bien dépenser, il y aura des dépenses d’investissement qui vont rester. »

Un argumentaire qui ne convainc pas l’économiste Marc Touati. « Ils font tout ça pour calmer les agences de notation mais il n’y a aucune mesure concrète derrière », assure-t-il. Quelle que soit la stratégie du gouvernement, les agences américaines Fitch et Moody’s ont, contre toute attente, décidé de maintenir inchangée la note de la France, le 26 avril dernier. Reste à savoir si Standard & Poors, qui rendra son verdict le 31 mai, sera du même avis.

3 101,2 milliards
C’est le montant de la dette publique de la France à la fin de l’année 2023.


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