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Au Gabon, le général Oligui Nguema sous pression financière près d’un an après sa prise de pouvoir

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C’est une lettre qui suscite l’émoi à Libreville. Dans un courrier daté du 1er juillet, dont le contenu a fuité dans la presse gabonaise, la Banque mondiale indique au gouvernement de transition qu’elle a décidé de geler les décaissements du Gabon à cause de ses impayés.

« Les échanges de correspondances entre les autorités gouvernementales et la Banque mondiale font partie des tâches de routine (…). Il est regrettable qu’un courrier officiel se retrouve dans la sphère médiatique au risque de créer des malentendus », a déploré l’institution bancaire, ajoutant que « la situation [était] sur le point d’être régularisée ». De son côté, le ministère gabonais des comptes publics a assuré, mercredi 3 juillet, au Monde, que le gouvernement avait « déjà procédé au paiement de ces impayés ».

Malgré ces propos volontiers rassurants, la situation financière demeure préoccupante pour le régime de transition dirigé par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, arrivé au pouvoir après son coup d’Etat contre Ali Bongo Ondimba, le 30 août 2023. Mi-juin, l’agence de notation Moody’s a dégradé la note du Gabon, faisant passer le pays de Caa1 à Caa2, à seulement deux crans de la note la plus faible.

Une décision justifiée par « une situation budgétaire plus faible qu’initialement prévu », a expliqué le cabinet américain, qui avait déjà abaissé la note du pays de stable à négative en septembre 2023. De quoi entamer un peu plus la confiance des investisseurs étrangers.

Le FMI pessimiste

Bien que les comptes de l’exercice de septembre 2023 à mai 2024, que Le Monde s’est procuré auprès du ministère des comptes publics, affichent un taux d’endettement de 54,68 %, les projections du Fonds monétaire international (FMI) sont bien plus pessimistes. Selon elles, la dette gabonaise pourrait encore s’aggraver, passant de 73,1 % à 78 % du PIB entre 2024 et 2025.

Une différence que les autorités expliquent par le manque de transparence et la corruption du régime déchu d’Ali Bongo Ondimba. « La task force créée aux premières heures du coup d’Etat a permis de mettre en évidence un volume plus important de dette, que nous avons partagé en toute transparence avec nos partenaires », se défend le ministre des comptes publics, Charles René Mba.

Le poids de l’héritage n’explique pourtant pas tout. Depuis l’arrivée des militaires au pouvoir, le pays continue de s’endetter à un rythme soutenu, notamment pour financer le plan national de développement pour la transition. Le gouvernement a aussi nationalisé des entreprises et est entré au capital de plusieurs grands groupes.

Après avoir acquis 30 % des parts de la Ceca-Gadis, numéro un de la grande distribution dans le pays, en janvier, l’Etat a acté le rachat d’Assala Energy, deuxième producteur national de pétrole, en février. Dans la foulée, il a également racheté 30 % des parts étrangères de la Société gabonaise d’entreposage des produits pétroliers (Sgepp) puis est entré dans le capital de la compagnie aérienne gabonaise Afrijet.

Un déficit budgétaire qui se creuse

Evalué à 7 131 milliards de francs CFA fin 2022 (un peu moins de 10,9 milliards d’euros), le montant de la dette gabonaise devrait dépasser les 8 000 milliards de francs CFA (environ 12,2 milliards d’euros) en 2024, prévient le dernier rapport du FMI, lequel précise que ce taux d’endettement dépasse le seuil de 70 % du PIB fixé par la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac).

Si les autorités gabonaises justifient ces dépenses par leur slogan « Gabon first » et espèrent un retour sur investissement conséquent, la dette pèse lourd dans les finances publiques. Cette année, le pays devrait consacrer près de 70 % des recettes à son remboursement, au détriment d’investissements pour le développement. Un critère d’alerte pour Agou Gomez, représentant du FMI au Gabon, qui concède néanmoins que les « nouvelles autorités ont hérité d’un contexte économique et social extrêmement difficile ».

Le FMI s’inquiète également du déficit budgétaire de l’Etat, qui se creuse de 1,6 % à 3,6 % du PIB entre 2023 et 2024 en dépit de l’augmentation des recettes fiscales et douanières. La bonne volonté des autorités de transition gabonaises à s’acquitter de leurs dettes est toutefois relevée par les institutions financières étrangères.

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Malgré le retard de paiement, la Banque mondiale réaffirme son engagement « à accompagner le Gabon pour garantir la mise en œuvre effective de l’ensemble des projets de son portefeuille ». Moody’s reconnaît aussi « la volonté des autorités de la transition à œuvrer en faveur des populations » et place, malgré tout, le pays en perspective stable.

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