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Avec « Descente au paradis » à Montpellier, l’artiste Kader Attia sème les indices et les arguments

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Kader Attia présente une exposition au MoCo, à Montpellier, la première de cette ampleur en France depuis celle qui eut lieu au MacVal, à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), en 2018. Mais le mot « exposition » est-il le plus juste ? Ce n’est pas une rétrospective : ni volonté d’exhaustivité ni respect de la chronologie. Il ne s’agit pas non plus de ne montrer que ses travaux les plus récents, même s’il y en a ici, associés à de plus anciens.

En fait, le terme qui paraît le plus précis est « réflexion » : une réflexion critique sur l’état de notre monde, logiquement construite. Les éléments visuels et sonores qui la composent sont ordonnés en trois phases, chacune d’elles occupant un étage du bâtiment, et le cheminement se faisant de haut en bas. Ainsi entre-t-on au niveau du « purgatoire », pour descendre vers l’« enfer », et descendre encore jusqu’au « paradis », à rebours des religions qui placent celui-ci dans les cieux. Se succèdent donc trois états : deux degrés différents de dégradation et de destruction pour les premiers, et un, le dernier, où se manifestent les signes d’une résistance. Il n’y a là rien d’autobiographique ou de subjectif. Tantôt Attia énonce arguments et preuves, tantôt il inscrit sa pensée dans des formes symboliques.

Quelques-unes des installations se comprennent aussitôt : par exemple, un long grillage métallique à demi ployé, aux mailles duquel se trouvent pris des morceaux de pierre ou de moellon, projectiles d’une révolte qui, en conclut-on, a échoué à renverser cette barrière. Ou encore une plantation de buissons desséchés, dont les branches portent des lance-pierres, autre image d’un soulèvement sans espoir. Cette fonction accusatrice est aussi celle des photographies sur lesquelles le regard bute dès l’entrée : de grands clichés des jetées faites de cubes de béton entassés les uns sur les autres. Ces faux rochers trop réguliers bordent ce qui paraît être l’entrée d’un port, et la mer elle-même n’est plus, dès lors, qu’un canal pour cargos, prise entre ces murailles : il ne reste rien de la nature, si ce n’est un ciel vide.

Force de suggestion des objets

Le sentiment de perte et d’enfermement s’aggrave encore quand un mur entier devient l’écran où est projetée une vidéo d’une cruelle simplicité. Passe en boucle le travelling d’une caméra qui glisse devant la façade d’un de ces grands ensembles de banlieue, où sont répétés des centaines de fois les mêmes fenêtres et les mêmes structures. Pour avoir vu une visiteuse exploser de colère devant ces images que la monotonie rend encore plus accablantes, on peut témoigner de leur efficacité. Il y avait là soudain, face à elle, une évidence qui lui était insupportable.

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