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En Côte d’Ivoire, la fédération de taekwondo mise à l’arrêt suite à une affaire de harcèlement sexuel

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K.-O. technique pour la Fédération ivoirienne de taekwondo (FITDK). Depuis le 25 octobre, toutes ses activités sont suspendues sur ordre du ministère des sports. Son siège a été fermé. Les entraînements, compétitions et passages de grades ont été reportés sine die en raison des conflits qui minent la direction, sur fond d’accusations de harcèlements sexuels sur mineures dans un sport à la popularité grandissante en Côte d’Ivoire depuis les Jeux olympiques de 2016. L’athlète Cheick Cissé avait alors décroché la première médaille d’or de l’histoire du pays.

L’affaire a éclaté lors d’un stage de cohésion d’équipe. Réunies à Bouaké du 5 au 8 septembre, les combattantes de l’équipe ivoirienne junior souhaitaient alors se préparer pour le championnat du monde des moins de 18 ans organisé début octobre en Corée du Sud. C’est là que leur coach se serait improvisé kinésithérapeute afin de leur proposer des massages intimes.

Ces allégations de harcèlement sexuel sont relatées par une athlète de 17 ans dans une plainte déposée par son père le 25 septembre auprès du parquet de la commune de Yopougon, à Abidjan. Si cette dernière mentionne avoir réussi à « échapper » à l’entraîneur, elle évoque le cas d’une autre mineure qui, elle, aurait eu des rapports sexuels avec le maître de taekwondo.

Informé de l’affaire, Jean-Marc Yacé, président de la FITDK également maire de la commune de Cocody à Abidjan, décide le 19 septembre de dissoudre le comité de direction, composé des présidents et vice-présidents de commissions. Seulement, une partie d’entre eux contestent ce choix et organisent un mois plus tard une assemblée générale extraordinaire pour démettre le président de ses fonctions. Ils l’invitent à une passation de pouvoir le 24 octobre au profit d’Ali Diomandé, désigné pour prendre la tête d’un comité de transition.

« Scandales récurrents »

Face à ce qu’il considère comme une réunion illégale, Jean-Marc Yacé écrit alors au ministère de l’intérieur pour le prévenir du déploiement de « taekwondoïstes chevronnés » afin de protéger les locaux de l’instance sportive. De son côté, Ali Diomandé sollicite le préfet de police d’Abidjan.

Si, en prononçant la fermeture temporaire du siège de la fédération, le ministère des sports évite ainsi un possible affrontement entre les deux parties, il ne règle pas la question des violences sexistes et sexuelles alors que le taekwondo n’en ait pas à sa première crise liée à des faits de harcèlement sexuel. En décembre 2023, Mariama Cissé avait révélé avoir été écartée du championnat d’Afrique après avoir refusé les avances de son entraîneur.

L’affaire avait conduit au renvoi du mis en cause et du directeur technique national. Abdoulaye Patrice Remarck avait rendu sa casquette de vice-président chargé des projets olympiques, refusant de cautionner les « scandales récurrents de harcèlements sexuels et d’abus de pouvoir ».

Dans la foulée, une commission d’enquête fut mise en place. « J’en attends toujours les conclusions », déplore Mariama Cissé. Même attente sur le plan pénal.  « Bien qu’il ait reconnu les faits lors de la confrontation devant les policiers, il n’a pas encore été condamné », constate amère l’athlète de 26 ans qui n’ose plus fréquenter les dojos de la FITDK depuis qu’elle a dénoncé son ancien maître. « J’ai l’impression de ne plus être la bienvenue. Comme si c’était moi la coupable et non la victime », confie-t-elle.

« La loi du silence »

A l’époque des faits, Mariama Cissé était vice-championne nationale dans la catégorie des moins de 57 kg et occupait le 68rang mondial. Aujourd’hui, elle se contente de combattre dans un club non affilié à la fédération ivoirienne. « J’ai renoncé à représenter les couleurs de mon pays. C’était le meilleur choix à faire pour ma tranquillité d’esprit », souligne-t-elle.

Pour Moussa Koné, à la tête de deux clubs à Yamoussoukro, le cas de Mariama Cissé est révélateur des dysfonctionnements de la fédération. « A l’international, on souhaite décrocher des médailles et montrer qu’on est performant. Mais, à la maison, on peine à mettre en place des mesures efficaces pour protéger nos athlètes des abus de pouvoir », remarque le professeur. Depuis l’ébruitement de l’affaire des mineures à Bouaké, Moussa Koné dit avoir perdu deux jeunes élèves de sa section féminine.

Afin d’éteindre les critiques et rassurer les parents, il suggère d’augmenter la part de femmes chez les maîtres et d’ajouter un module obligatoire sur les violences sexistes et sexuelles dans le brevet national d’entraîneur. Un constat partagé par Mariama Cissé qui affirme que « beaucoup d’autres licenciées ont subi la même chose qu’[elle] et certaines ont même dû céder au chantage. Mais elles n’osent pas en parler de peur d’être entravées dans leur pratique ». A l’échelle mondiale, 21 % des sportives auraient subi une forme d’abus sexuel, d’après l’Unesco, entravant de fait le développement du sport féminin.

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Sans un plan de formation massive à la prévention et à la détection de ces actes dans les institutions sportives, il y a peu de chance que « la loi du silence soit brisée », soutient l’ancienne championne. En attendant, le ministère des sports indique qu’il va poursuivre ses investigations et entendre les deux principaux protagonistes qui se disputent la direction de la FITDK. Avant de se prononcer sur un éventuel rétablissement des activités.

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