« Kaylia Nemour, Algérienne plus que jamais », Une « première pour l’Algérie et l’Afrique en gymnastique »… Les sites d’informations Tout sur l’Algérie (TSA) et 24H Algérie ont rapidement donné le ton de la « Kayliamania » qui s’est emparée du pays après la médaille d’or arrachée dimanche 4 août par la gymnaste de 17 ans lors de la finale des barres asymétriques aux Jeux olympiques (JO) de Paris.
Le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, a réagi quasiment en direct, alors même qu’il présidait une cérémonie à l’occasion de la journée nationale de l’armée algérienne : « Au nom de l’armée, au nom de la présidence de la République et au nom du peuple algérien, nous félicitons notre athlète Nemour pour sa médaille d’or. » La présidence a fait savoir que le chef de l’Etat a félicité directement par téléphone la sportive, dont la prestation éclatante a fait chavirer les cœurs des internautes algériens.
Le ministre de la jeunesse et des sports, Abderrahmane Hammad, a quant à lui salué la première médaille olympique africaine de l’histoire en gymnastique. « Vous avez été incroyable et exceptionnelle. Avec maîtrise, talent et efforts acharnés, vous avez fait flotter haut le drapeau algérien dans le ciel parisien ! Nous sommes si fiers de vous », a-t-il écrit sur le réseau social X.
L’Algérie compte actuellement deux médailles et elles ont été obtenues par des femmes. Outre Kaylia Nemour, Imane Khelif, victime d’une polémique sur sa féminité à cause de son taux élevé de testostérone, a d’ores et déjà assuré une autre récompense à son pays après s’être qualifiée pour les demi-finales des moins de 66 kg, qui se tiennent ce lundi soir.
« Un cadeau tombé du ciel »
Les grandes compétitions sportives sont toujours l’occasion d’un chauvinisme débridé, mais le cas de Kaylia Nemour a renforcé le sentiment de revanche en Algérie. Née en France et formée au club d’Avoine-Beaumont (Indre-et-Loire), la gymnaste, qui a la double nationalité, a d’abord concouru sous les couleurs de son pays natal avant que des désaccords avec la Fédération française de gymnastique sur fond de problèmes médicaux ne la poussent à revêtir celles de l’Algérie.
« La jeune athlète a été interdite de compétition par la fédération française pour une raison peu convaincante et c’est son pays, l’Algérie, qui lui a tendu la perche qui lui a permis de s’accrocher, de sauver sa carrière, de monter au sommet et de réaliser son rêve olympique. C’est tout le sens de l’appartenance à une nation, on la sert et on s’en sert », écrit TSA, qui critique certains médias français ayant tendance à occulter le pays que la sportive représente. Certes, souligne-t-il, Kaylia Nemour, née et formée en France, est arrivée « comme un cadeau tombé du ciel », mais « sans sa double nationalité et sans la porte que l’Algérie lui a ouverte, Kaylia Nemour ne serait pas championne olympique, du moins pas maintenant ».
Ce pied de nez à la France survient en pleine crise diplomatique entre Paris et Alger suite à une lettre d’Emmanuel Macron au roi marocain, Mohammed VI, à propos du Sahara occidental. Le président français estime que le plan marocain d’autonomie de cette région « sous souveraineté marocaine » est la « seule base » permettant le règlement de ce conflit, ce qui a immédiatement provoqué la colère d’Alger, qui a retiré son ambassadeur à Paris le 30 juillet.
Ce nouveau froid dans les relations entre la France et l’Algérie n’est pas explicitement évoqué après la victoire de Kaylia Nemour, mais 24H Algérie rappelle que les JO charrient des symboles bien au-delà du sport : « Les fleurs jetées à la Seine par des membres de l’équipe [algérienne] pour saluer la mémoire des victimes du massacre d’octobre 1961 ordonné par le préfet Papon, l’hymne national entonné à Paris après la victoire de Kaylia Nemour et l’endurance d’Imane Khelif face à la déferlante haineuse sur les réseaux sociaux. Honneur aux militants de l’indépendance, honneur aux femmes algériennes. Suffisant pour que ces jeux apportent satisfaction et fierté », écrit le journal en ligne.