Une seule question : combien de temps l’Afrique devra-t-elle encore attendre avant d’accueillir les Jeux olympiques (JO) ? Depuis sa résurrection en 1896 par Pierre de Coubertin, le plus prestigieux des événements sportifs n’a jamais été organisé dans cette vaste partie du monde. « On ne peut pas dire que ce soit triste ou une anomalie. Vu l’ampleur des JO, ça se comprend. Il faut être réaliste », estime Mohamed Diop, ancien nageur sénégalais qui a participé aux éditions de Séoul (1988) et Barcelone (1992). « L’explication est simple : les moyens infrastructurels ne sont pas à la hauteur », résume l’Algérien Mustapha Berraf, président de l’Association des comités nationaux olympiques d’Afrique.
Voilà pourquoi jusqu’à présent peu de pays du continent ont tenté le pari d’attirer les Jeux. Il y a plus d’un siècle, le Comité international olympique (CIO) préféra choisir Berlin pour son édition de 1916 – finalement annulée à cause de la première guerre mondiale – plutôt qu’Alexandrie (l’Egypte était alors sous occupation britannique). En 1997, Le Cap aurait bien pu se voir confier les Jeux de 2004, mais la cité balnéaire d’Afrique du Sud a été éliminée au quatrième tour du scrutin au profit d’Athènes. « Ça va changer, veut croire M. Berraf, par ailleurs membre du CIO. J’ai vu les mentalités évoluer ces dernières décennies. »
Pendant longtemps, le continent aux 54 pays a connu une histoire tumultueuse avec le mouvement olympique faite de préjugés et de déshonneurs. Lors des Jeux de Saint-Louis (Missouri) en 1904, Len Tau et Jan Mashiani, de la tribu tswana d’Afrique du Sud, sont les premiers Africains noirs à disputer une épreuve olympique : le marathon. Ces deux hommes, qui ont terminé respectivement neuvième et douzième de la course, sont venus aux Etats-Unis pour être exhibés à une rétrospective sur la guerre des Boers pendant l’Exposition universelle se déroulant au même moment.
En parallèle des JO américains, deux « journées anthropologiques » réservées aux « races inférieures » sont organisées. Pygmées, Sioux, Apaches – Geronimo a été exposé –, Patagons et autres Moros s’affrontent dans des épreuves humiliantes, « entre eux », pour divertir le public du Missouri. Cet épisode restera comme l’une des hontes indélébiles de l’histoire olympique.
« Une perspective impériale »
Pierre de Coubertin, qui n’a pas fait le voyage outre-Atlantique, juge que « cette mascarade outrageante se dépouillera naturellement de ses oripeaux lorsque ces Noirs, ces Rouges, ces Jaunes apprendront à courir, à sauter, à lancer et laisseront les Blancs derrière eux ». Toutefois, en homme de son époque, il pensait aussi que « la théorie de l’égalité des droits pour toutes les races humaines conduit à une ligne politique contraire à tout progrès colonial ».
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