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« Le revenu de base universel n’est pas destiné à rejoindre le cimetière des fausses bonnes idées »

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Faire trop de promesses pour ne pas les tenir est l’un des risques professionnels dans le monde de la lutte contre la pauvreté. Trop souvent, des rêves sont brisés par la brutale épreuve des faits. Qu’en est-il de la dernière coqueluche en date, le revenu de base universel (RBU) ? L’idée selon laquelle chacun devrait bénéficier d’un revenu minimum de base, indépendamment de ses ressources, séduit un large public. Cet engouement est partagé aussi bien par ceux pour qui il ne peut y avoir de justification morale à l’extrême pauvreté que par les milliardaires de la Silicon Valley, qui s’inquiètent des retombées politiques des pertes d’emplois induites par l’intelligence artificielle.

Une allocation universelle et inconditionnelle élimine la tentation d’exagérer sa pauvreté soit en travaillant moins, soit en cachant ses revenus en travaillant au noir. L’expérience montre que le premier souci n’en est pas vraiment un, mais le deuxième l’est. Aujourd’hui, dans les pays pauvres, les programmes gouvernementaux ciblés sur les pauvres finissent par arroser beaucoup de non-pauvres. Malheureusement, les contrôles supplémentaires (imparfaitement mis en œuvre) destinés à empêcher ces fuites finissent souvent par exclure davantage les plus vulnérables. Et ceux qui le sont moins finissent souvent par contourner le système. Le RBU évite ces erreurs de ciblage, mais il le fait en distribuant de l’argent à un grand nombre de personnes qui n’en ont pas besoin. Cela signifie que le montant qui peut être distribué à ceux qui en ont vraiment besoin est réduit d’autant. Mais ce sacrifice peut en valoir la peine si les capacités de ciblage sont très faibles, comme c’est précisément le cas dans les pays les plus pauvres.

Par ailleurs, un argent garanti, versé mois après mois, peut changer le comportement des gens. L’idée selon laquelle l’argent facile rend les gens paresseux ou, pis, les rend dissolus, parce qu’ils ont désormais le temps et l’argent pour fumer et boire, a une longue tradition dans l’économie et la politique conservatrices.

Travailler plus

Mais il existe également une vision plus optimiste, selon laquelle un revenu de base pourrait être un tremplin. Imaginez quelqu’un dont le rêve est de quitter son travail de cuisinière dans une maison pour ouvrir son échoppe. Il pourrait s’agir d’un stand au bord de la route à Calcutta, avec quelques bancs de fortune et une bâche au-dessus, servant les snacks prisés des employés de bureau. Ce qui l’arrête peut-être, c’est le fait qu’elle ne peut pas financer le pot-de-vin exigé par les voyous locaux pour quiconque veut occuper un bout de trottoir. Maintenant, grâce au RBU, elle peut y arriver. Ou bien elle hésite peut-être à sauter le pas, parce qu’elle se dit que les clients potentiels n’aimeront pas sa cuisine. Le RBU lui donnerait un filet de sécurité. Ou bien c’est une barrière psychologique qui l’arrête : la vie a été si dure pour elle jusque-là qu’elle pense que rien ne marchera jamais pour elle. Le RBU pourrait lui donner l’espoir qu’une deuxième chance est possible.

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