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Marguerite Abouet, créatrice de la bande dessinée « Aya de Yopougon », victime d’une campagne raciste

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Le 17 juin, à Paris, Marguerite Abouet, la scénariste des célèbres bandes dessinées Aya de Yopougon et Akissi, ­recevait des mains de l’ancien ministre de l’éducation Pap Ndiaye la médaille de chevalier de l’ordre national du Mérite. Deux semaines plus tard, au soir du premier tour des élections législatives anticipées, la Franco-Ivoirienne de 53 ans est en Martinique. Invitée du festival Partir en livre, elle est accompagnée de son fils de 17 ans, fraîchement bachelier. Alors que l’ouragan Beryl menace l’archipel, le Rassemblement national arrive en tête, avec 33,35 % des suffrages exprimés. « Nous étions dans un restaurant, et les gens autour de nous étaient contents. J’ai pris un coup », admet-elle.

Propulsée star de la bande ­dessinée jeunesse dans les années 2000 avec presque 1,3 million d’exemplaires vendus, Marguerite Abouet n’est pourtant pas du genre à se laisser abattre par la politique. « Moi, je crois en ma France », affirme-t-elle. Sur le moment, elle s’est attelée à rassurer son fils. Puis son été a continué, marqué par la préparation de la sortie de son prochain livre, le onzième volume des aventures d’Akissi. Pendant quatorze ans, avec le dessinateur Mathieu Sapin, elle a chroniqué les tribulations de cette petite Ivoirienne qui lui ressemble beaucoup, dans le quartier de Yopougon, à Abidjan.

Mais l’histoire de la fillette prend, en cette rentrée, un tour nouveau : comme Marguerite Abouet avant elle, à 12 ans, Akissi quitte son pays pour la France. Pour le lancement du tome 1 de ce nouveau cycle, baptisé Akissi de Paris, Gallimard Jeunesse a mis les petits plats dans les grands, avec un tirage initial de douze mille exemplaires. Le 21 août, l’éditeur en dévoile la couverture sur Facebook, par un post « sponsorisé », une pratique courante par laquelle la plate-forme, contre rémunération, accroît la circulation d’une publication. Celle-ci peut ainsi toucher un public bien plus large, et pas nécessairement le premier visé. Le message annonce : « Akissi débarque à Paris ! Akissi vient de quitter la Côte d’Ivoire et fait sa rentrée dans un collège parisien. Mais l’intégration n’est pas facile : ­nouveau pays, nouveaux codes, nouveaux amis… A peine arrivée, Akissi est déjà au bout de sa vie ! »

Messages de haine

Le lundi suivant, les équipes de Gallimard Jeunesse découvrent, effarées, les centaines de commentaires racistes postés durant le week-end en réponse à la publication. « J’ai toujours accepté la critique – on a le droit de ne pas aimer ce que je fais. Mais là, c’est carrément autre chose », confie Marguerite Abouet. Depuis le début de sa carrière, en racontant « des histoires universelles pour montrer que l’autre, c’est nous tous », elle s’attelle, dit-elle, à lutter contre les préjugés, enjoignant ses jeunes lecteurs à tisser des liens « par la connaissance et la compréhension ». Pour la première fois, la voici prise pour cible par une armée de trolls anonymes.

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