Des mercenaires syriens pro-Turcs au Niger ? L’information, pas encore confirmée par des documents probants, a commencé à filtrer début mai avec l’annonce par l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH, basé à Londres) des premiers morts rapatriés au pays, victimes syriennes enrôlées sur le front du lointain Sahel au service des desseins géopolitiques d’Ankara.
Depuis lors, l’OSDH, centre d’information lié à l’opposition syrienne, s’est régulièrement fait l’écho d’arrivées successives au Niger de « plus d’un millier » de ces combattants syriens sous la houlette de Sadat, une société privée de sécurité turque proche du président Recep Tayyip Erdogan. Si l’offensive turque en Afrique est une vieille histoire, où l’offre sécuritaire se mêle aux contrats économiques, à l’humanitaire et à la promotion d’un islam de l’école des Frères musulmans, une attention nouvelle semble se porter au Sahel à l’heure où le départ des Français et des Américains invite à rafler de nouveaux gains stratégiques.
« Au Niger, les mercenaires syriens sont censés garder des mines, des installations pétrolières ou des bases militaires, souligne Rami Abdel-Rahman, le directeur de l’OSDH. Mais ils se retrouvent ensuite impliqués dans des combats contre les groupes djihadistes. Neuf de ces combattants syriens sont morts à ce jour. » Fait troublant, l’OSDH rapporte que ces miliciens se retrouvent à combattre aux côtés des « Russes » d’Africa Corps (ex-Wagner), voire abandonnés à l’autorité de ces derniers, alors que Moscou et Ankara sont censés être en rivalité sur le théâtre syrien. « En fait, Russes et Turcs coopèrent au Niger », assure M. Abdel-Rahman.
L’AFP a publié le 16 mai une dépêche citant deux miliciens syriens pro-Turcs joints au téléphone, l’un présent au Niger, l’autre se préparant à s’y rendre. Mais la présence de ces Syriens au Niger n’est pas encore formellement établie de manière irréfutable. Les sources sécuritaires, politiques et diplomatiques installées au Niger et jointes par Le Monde affirment ne pas disposer de preuves attestant du déploiement de ces paramilitaires engagés par Sadat.
« L’armée parallèle » de Recep Tayyip Erdogan
Une telle projection militaire d’Ankara en terre sahélienne, si elle était confirmée, ne serait toutefois pas absurde au regard des pratiques turques. Selon des sources sécuritaires ouest-africaines, des négociations ont bien eu lieu entre le régime militaire à Niamey et Sadat, outil sécuritaire mis au service de la stratégie d’influence de la Turquie. A l’automne 2020, Sadat avait ainsi dépêché des mercenaires syriens en soutien de l’Azerbaïdjan dans son conflit avec l’Arménie sur le Haut-Karabakh.
Il vous reste 67.95% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.