Le tribunal a fait salle comble, mercredi 27 novembre, pour le vingt-sixième et dernier jour du procès des assistants Front national (FN) au Parlement européen : la salle était pour moitié composée de journalistes, pour l’autre de proches du Rassemblement national, venus rire aux quelques bons mots de l’avocat de Marine Le Pen.
La 11ᵉ chambre du tribunal de Paris rendra son jugement le 31 mars 2025, un jugement qui sera scruté de très près, avec pour enjeu central la question de l’inéligibilité de Mme Le Pen. Or, Mᵉ Rodolphe Bosselut, le dernier avocat de la défense, a eu le temps de soulever quelques points qui, s’ils étaient suivis par le tribunal, n’imposeraient pas cette inéligibilité automatique à la triple candidate à la présidentielle.
Fort actif pendant toute l’audience, Me Bosselut s’était fait une spécialité des longues questions si fermées que le prévenu ne pouvait répondre que par oui ou par non ; heureusement, elles contenaient toujours un indice de la bonne réponse, afin d’éviter tout aléa. L’avocat de Marine Le Pen a plaidé mercredi pendant trois grandes heures avec le seul soutien d’une bouteille d’eau, citant à quatre reprises Le Monde qu’il lit consciencieusement, avec certes une irritation croissante.
Il s’est attaqué tout de suite au cœur de la poursuite, la possible inéligibilité de Marine Le Pen, contre qui le parquet a réclamé cinq ans de prison dont trois avec sursis, 300 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité, avec exécution provisoire, c’est-à-dire applicable immédiatement, sans attendre un possible appel.
Mᵉ Bosselut a prévenu qu’il risquait d’être « ennuyeux » : le point est un peu technique, mais assurément décisif. Marine Le Pen est en effet poursuivie à deux titres : comme « auteure », pour avoir embauché quatre assistants, et comme « complice par instruction », en tant que chef du parti, pour huit autres assistants, « sur neuf contrats seulement, parce qu’elle n’est pas responsable du FN avant janvier 2011 » – c’était alors son père, Jean-Marie Le Pen, qui dirigeait le mouvement.
Une affaire de dates
Comme auteure, la députée du Pas-de-Calais est poursuivie pour avoir détourné des fonds publics par l’embauche de quatre supposés assistants parlementaires, et c’est une affaire, précisément, de dates.
Thierry Légier, le garde du corps, a été à deux reprises assistant de Marine Le Pen, de septembre à décembre 2009, puis d’octobre à décembre 2011. Catherine Griset, la fidèle secrétaire devenue la cheffe de cabinet de la présidente, l’a été de décembre 2010 à octobre 2016. Guillaume L’Huillier, le directeur de cabinet de Jean-Marie Le Pen, et surtout proche de Bruno Gollnisch, n’a été employé par Marine Le Pen que de novembre 2009 à juin 2011. Enfin Micheline Bruna, la secrétaire du patriarche, n’a été l’assistante parlementaire de Marine Le Pen qu’une seule journée, le 3 décembre 2008, « en raison d’un surcroît d’activité » – en réalité pour apurer l’enveloppe de Marine Le Pen accordée par le Parlement.
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