De Perpignan, où le Rassemblement national (RN) tenait son meeting du 1er-Mai, la tête de liste du parti aux élections européennes, Jordan Bardella, et Marine Le Pen ont mis leurs électeurs en garde contre l’« abstention » et la « dispersion » des voix à quarante jours du scrutin.
« Ne vous dispersez pas sur des listes patriotes qui ne peuvent pas gagner. Ne vous abstenez pas. S’abstenir, c’est voter Emmanuel Macron. Ne lui offrez pas ce cadeau », a lancé l’eurodéputé, placé en tête jusqu’ici dans les sondages. Quelques minutes avant, la présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale et triple candidate à la présidentielle a également sonné la mobilisation dans son camp. « Pour tout patriote français, la participation à ce scrutin est un devoir, un commandement (…) Quand le sort du pays est en jeu, on ne s’égare pas », a notamment déclaré Mme Le Pen de la tribune.
Dans le viseur des deux élus d’extrême droite, les électeurs tentés par la candidature de Marion Maréchal (Reconquête !). Pour M. Bardella, « la France n’a plus le temps de regarder ses voix patriotes se disperser. Venez à nos côtés, choisissez ceux qui peuvent agir. Je vous tends la main ». Il s’est aussi adressé « aux électeurs de la droite orphelins d’un candidat, d’une vision » qui sont « attachés au travail, au mérite, à l’autorité, à une certaine idée de la France ». « Regardez qui a pris le flambeau », a-t-il déclaré.
Tentant de dramatiser l’enjeu de ces élections européennes prévues le 9 juin, M. Bardella a estimé que ce scrutin est un « vote de civilisation » engageant le « destin de la France » et qui sera « décisif pour l’avenir de vos enfants ». « Ce 9 juin, c’est un référendum pour ou contre le délitement et l’effacement de la France », a-t-il également résumé, au cours d’un discours de près de quarante-cinq minutes devant environ 2 000 personnes. Le candidat du RN a ensuite tenté de resserrer l’enjeu de cette campagne en attaquant surtout le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, et la candidate du camp présidentiel, Valérie Hayer.
« Vous aurez à choisir entre deux visions de l’Europe, a-t-il assuré. L’Europe de Macron : celle de l’écologie punitive, de l’immigration imposée, de la décroissance, de la concurrence déloyale et désormais du partage de notre arme nucléaire. De l’autre côté, vous pouvez choisir l’Europe des nations, celle des réalités, des gens, du concret, des identités, des frontières, de la préférence européenne. » De son côté, Marine Le Pen a appelé ses électeurs à « contrer, sanctionner, congédier, à donner à ce pouvoir la plus cinglante sanction électorale qu’on puisse lui infliger ».
Maîtrise des frontières et réindustrialisation
Alternant entre des mesures nationales et européennes, Jordan Bardella a énuméré quelques-unes de ses promesses qui visent en particulier « à retrouver la maîtrise de nos frontières nationales et européennes », à « réindustrialiser », à « privilégier le local » et « à protéger les entreprises face à la concurrence déloyale ». « A quoi sert l’Europe si elle n’utilise pas sa taille pour faire face à la guerre économique ? », a-t-il interrogé. Le député européen, qui s’est montré particulièrement discret au Parlement durant la dernière législature, promet « la priorité nationale et la préférence européenne dans la commande publique ». « Chaque bateau qui accostera sur notre territoire sera renvoyé systématiquement vers son port d’origine », a-t-il également promis, acclamé par les militants du RN.
Le candidat d’extrême droite est également revenu sur une interview d’Emmanuel Macron publiée dimanche dans des quotidiens régionaux où le chef de l’Etat s’est dit prêt à « ouvrir le débat » d’une défense européenne qui comprendrait aussi l’arme nucléaire. « Je suis pour ouvrir ce débat qui doit donc inclure la défense antimissile, les tirs d’armes de longue portée, l’arme nucléaire pour ceux qui l’ont ou qui disposent sur leur sol de l’arme nucléaire américaine », a-t-il estimé, appelant les pays européens à mettre toutes les options « sur la table », en regardant « ce qui protège véritablement de manière crédible ». Or pour M. Bardella, « consentir à une défense européenne reviendrait à priver notre nation d’attributs indispensables à l’exercice de sa souveraineté ».
Près d’un mois avant le scrutin du 9 juin, M. Bardella et Mme Le Pen ont une nouvelle fois défendu « l’Europe des nations » contre l’Union européenne actuelle, définie par la députée du Pas-de-Calais comme une « créature curieuse, hors sol, qui ne doute de rien ». « La moindre critique contre elle est frappée d’interdit, comme si le von-der-leyisme était une religion révélée », a fustigé Mme Le Pen, visant la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. « Nous avons raison d’être critiques. Nous avons raison de vouloir autre chose pour l’Europe et pour la France et pour nous-mêmes », a-t-elle également défendu.