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l’ex-ministre Aurélien Rousseau, candidat de la gauche, en campagne face à la grande confusion politique

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Hôtel de Matignon, mars 2023. La nuit est tombée et Aurélien Rousseau, directeur du cabinet d’Elisabeth Borne, se penche sur les tableaux. « Ça ne passe pas », dit-il, en comptant le nombre de voix de députés Les Républicains (LR) pour voter ric rac la très contestée réforme des retraites. « Non, ça ne passe pas », résonne la voix d’un homme dans la pièce, le président de LR, Eric Ciotti. La table du macronisme a réuni un énarque passé par les cabinets du quinquennat Hollande, communiste dans sa jeunesse gardoise, et le député des Alpes-Maritimes qui disait en 2022 préférer Eric Zemmour à Emmanuel Macron. Les voilà tous deux dans le même bateau, ensemble contre les mobilisations populaires menées par les leaders de la gauche.

Un an plus tard, tout a changé. La trajectoire des deux hommes illustre l’écartèlement accéléré du champ politique. La « clarification » souhaitée à l’Elysée, après la victoire du Rassemblement national (RN) aux européennes et la dissolution de l’Assemblée, tourne à la grande confusion des étiquettes et des repères. Aurélien Rousseau, artisan du « 49.3 » [l’article de la Constitution permettant de faire adopter un texte sans vote au Parlement] qui a reporté l’âge légal de départ de la retraite à 64 ans, est candidat aux législatives sous les couleurs du Nouveau Front populaire, alliance qui promet… d’abroger la réforme des retraites. Eric Ciotti a rejoint, lui, le RN de Jordan Bardella, qui vient de remettre à plus tard sa promesse de détricoter la même réforme.

Quand Aurélien Rousseau saute dans la bataille électorale, vendredi 14 juin, pressé par le maire de Marseille, Benoît Payan, le secrétaire national du PS, Olivier Faure, le chef de file Place publique, Raphaël Glucksmann, et François Hollande, son téléphone ne cesse de vibrer. Sur l’écran, s’affiche le nom d’Eric Ciotti. « On fait la même chose, on se radicalise ! », s’amuse le patron LR, exclu de son parti par son état-major. Le député des Alpes-Maritimes cherchait encore à éviter, dix jours plus tôt, une censure du gouvernement Attal, de peur de cette « diagonale du fou » qu’Emmanuel Macron pouvait déclencher – la dissolution et son couperet électoral.

« C’est quoi, le programme ? »

Le ralliement d’Aurélien Rousseau a moins amusé l’Elysée. « Je suis sidéré », lui fait savoir Alexis Kohler, son ex-homologue avec qui il partageait les déjeuners « PR-PM » [entre le président de la République et le premier ministre]. « On peut échanger sur nos sidérations », rétorque l’accusé, qui avait déclenché la fureur d’Emmanuel Macron lorsqu’il avait claqué la porte sur la loi « immigration ». « J’étais un mec de gauche en Macronie, je ne fais pas semblant d’avoir été un agent infiltré », affirme-t-il aujourd’hui, puisqu’il aurait, tout compte fait, préféré mener la réforme avec la CFDT de Laurent Berger plutôt qu’avec la droite. A gauche, Raphaël Glucksmann voulait cet ancien ministre en rupture avec la Macronie, idéal pour donner à ses partisans plus de poids dans l’attelage. « Il faut des sociaux-démocrates, donc il faut que tu sois dedans », a-t-il insisté auprès du conseiller d’Etat, d’abord dubitatif.

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