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« L’hypothèse d’une cohabitation avec le RN est-elle la promesse d’une France à deux voix, devenant de fait inaudible ? »

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Qu’adviendra-t-il de la voix de la France au soir du second tour des élections législatives précipitées par la dissolution de l’Assemblée nationale à l’initiative d’Emmanuel Macron ? La question mérite d’être posée sans attendre le 7 juillet, compte tenu de la probabilité d’une cohabitation entre le président en place, qui entend le rester, et une majorité, absolue ou relative, portant les couleurs du Rassemblement national (RN).

Lors des expériences de cohabitation précédentes, de 1986 à 1988, de 1993 à 1995, puis de 1997 à 2002, la coexistence entre deux familles politiques opposées avait été facilitée par un consensus géopolitique. Il était résumé par une formule parfois contestée : le gaullo-mitterrandisme, soit l’attachement à l’indépendance stratégique d’une France rangée dans le camp occidental, « alliée, mais pas alignée » sur les Etats-Unis.

L’ancien ambassadeur Michel Duclos note qu’il n’existait « aucune divergence entre les deux camps sur les valeurs comme sur les grandes options diplomatiques » qui prévalaient alors. « Le gouvernement ne cherchait pas à embarrasser le président dont la compétence était reconnue », ajoute l’ancien ambassadeur Gérard Araud, qui avait vécu aux premières loges les deux dernières cohabitations.

Cette période est cependant révolue du fait de la profonde remise en cause des équilibres mondiaux à l’œuvre depuis près de deux décennies. Eu égard aux origines de son mouvement, se revendiquer sans vergogne du gaullisme, comme ne manque pas de le faire la dirigeante de fait du RN, Marine Le Pen, peut se concevoir par opportunisme politique, au prix cependant d’un péché d’anachronisme.

Certes, l’agression de Kiev par Moscou a forcé la leader du RN à une délicate volte-face pour s’éviter un procès en nationalisme à géométrie variable, alors qu’elle défendait depuis 2011 le principe d’une « alliance stratégique » avec la Russie, considérant en 2022 que « la sécurité européenne (…) ne peut exister sans elle ». Mais que vaut ce revirement ? Emmanuel Macron considère que la « sécurité » des Français passe par « la défaite de la Russie » en Ukraine. Marine Le Pen, elle, estime que « stratégiquement et politiquement il est illusoire de croire que la Russie va retirer ses troupes dans ce qui serait alors pour elle une défaite cinglante, défaite que nous ne pourrions d’ailleurs obtenir sans l’entrée en guerre de l’OTAN et donc une mondialisation du conflit ».

Vision du monde

L’incompatibilité de ces deux analyses est flagrante, même si en mars le RN s’est contenté de s’abstenir lors du vote sur un accord de défense conclu avec l’Ukraine, présenté par Marine Le Pen comme « intenable militairement, financièrement et industriellement » et n’apportant « aucune garantie à une amélioration de la situation ». Pour Gérard Araud, les divergences sont tout aussi fortes sur l’Union européenne, dossier pour lequel la perte de leadership d’Emmanuel Macron a été, selon lui, instantanée.

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