Un soir à l’Elysée, mardi 30 avril, un bon mois avant la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron. Le fils de l’ancien dentiste du Sénat et d’une céramiste, titulaire d’aucun grand diplôme, est élevé au grade d’officier de la Légion d’honneur par le président de la République. Pierre Charon, le récipiendaire, a reçu quitus pour inviter qui il voulait, et l’intéressé possède un carnet d’adresses très dense, aux confins du show-business, de la Sarkozie, de la police et, maintenant, de la Macronie. Claude Bartolone et Richard Ferrand, anciens présidents de l’Assemblée nationale, côtoient l’animateur Arthur, dont Charon fut le conseiller personnel, et son épouse, l’ancienne Miss France Mareva Galanter, Frédéric Péchenard, ex-directeur de la police, Ange Mancini, ancien patron du renseignement… L’acteur Christian Clavier, « [son] meilleur ami », est excusé.
Pour caser tout le CV de Pierre Charon dans son discours, Emmanuel Macron a dû être bien embêté, car la vedette de la soirée est quelque peu éclectique et, surtout, l’essentiel de ses mille vies n’a rien d’officiel. Son influence s’exerce dans des zones aléatoires, toujours dans le sillage des puissants. Certes, il fut sénateur (Les Républicains) de Paris de 2011 à 2023, mais il fut surtout l’homme à tout faire de Jacques Chirac à la Mairie de Paris et le « porte-flingue » de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, avant de devenir l’un des conseillers informels d’Emmanuel Macron. Il fut directeur du Domaine de Chambord, ancien employé d’Elf Aquitaine, de France Loto, de France Galop, de Canal+ et de Publicis, mais surtout le fournisseur masqué, « établi depuis 1974 », des meilleurs potins de la République.
Emmanuel Macron a bien résumé : « La vraie profession de Pierre Charon, c’est d’être Pierre Charon : un homme de confiance et de prescience. (…) Comme chez Audiard, au bout d’un moment, vous ne causez plus, vous flinguez ! (…) Jamais très loin de l’action, toujours au service de la République, voici ce que vous êtes : un homme pétri de résistance, de complots qu’on pense impossibles, de projets fous. » Prémonitoire ?
Depuis ce dimanche 9 juin historique, pas un article qui tente de documenter les circonstances de la dissolution de l’Assemblée nationale n’omet de mentionner Pierre Charon. Celui qui, avec trois autres démiurges, aurait contribué à convaincre le président de déclencher ce pari audacieux… Ou insensé. Dans le coup : le conseiller mémoire de l’Elysée et ancien journaliste, Bruno Roger-Petit (dit « BRP »), le vice-président de Publicis et ex-conseiller à l’Elysée, Clément Leonarduzzi, le conseiller spécial du président, Jonathan Guémas et… Pierre Charon.
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