« Quatre-vingts ans après l’obtention par les femmes du droit de vote, il est temps de passer à un deuxième acte de la parité en politique »

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Il y a quatre-vingts ans, le 21 avril 1944, les femmes françaises sont enfin devenues citoyennes. L’article 17 de l’ordonnance du gouvernement provisoire de la République française, basé à Alger, le promulgue : « Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. » C’est là une particularité française : droit de vote et droit d’être élue ne furent pas acquis par des votes parlementaires, mais par une ordonnance dans la foulée de la Résistance, après cent cinquante ans de mobilisations civiques de militantes opiniâtres.

Quatre-vingts ans plus tard, où en sommes-nous dans la parité en politique ? Force est de constater que si ce droit d’éligibilité a été une étape nécessaire, il est loin d’être suffisant dans le contexte de l’histoire et des mentalités françaises. Des lois contraignantes ont été, et sont encore nécessaires pour qu’évoluent les pratiques et la réalité. Pour preuve, si l’Assemblée nationale élue en octobre 1945 comptait 6 % de femmes, ce pourcentage n’avait pas évolué en 1993, soit près de cinquante ans plus tard.

Et ce, seulement grâce au mouvement paritaire des années 1990 et à une mobilisation pour des lois instaurant la parité dans les instances élues que de réelles avancées furent obtenues, notamment par la révision de la Constitution en 1999. Son article 1 mentionne que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».

Zones blanches de la parité

Aujourd’hui, ne serait-il pas temps de changer ce verbe « favoriser » par « garantir » ? Et d’inscrire vraiment la parité dans la Constitution ? Les diverses lois successives des années 2000 ont engendré des progrès indéniables, mais de nombreuses zones blanches de la parité demeurent. Seulement 42 % de femmes dans les conseils municipaux des communes de moins de 1 000 habitants. Seulement 26 % de femmes dans les exécutifs des intercommunalités qui sont dirigés à 89 % par des hommes. Seulement 20 % de femmes maires ou présidentes de département. Le Sénat ne compte que 36 % de sénatrices et l’Assemblée nationale que 37 % de députées, sans évolution entre 2017 et 2022. Les anciennes pratiques inégalitaires, discriminantes et sexistes et les stéréotypes sont tenaces.

Il faut aussi évoquer les violences sexistes et sexuelles que des élues subissent au sein même des instances. En 2021, le réseau Elues locales a mené une enquête à laquelle près de 1 000 femmes élues ont répondu. Parmi elles, 74 % affirment avoir subi des violences sexistes ou sexuelles dans le cadre de leur mandat. Sur ces 74 %, 82 % disent avoir subi ces violences de la part de collègues élus. Ces élues, engagées pour leur territoire, pour leurs concitoyennes et concitoyens, deviennent des victimes. Ces violences reflètent une part du mal-être des élues, dont témoignent des démissions ces dernières années. Or, les mécanismes pour défendre et protéger ces représentantes de la République sont soit inexistants, soit inopérants.

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