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Comment la SNCF veut acheter la paix sociale avant les JO en chouchoutant ses futurs retraités

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Comment éviter à tout prix une grève pendant les Jeux olympiques de Paris, qui auront lieu du 26 juillet au 11 août ? La question obsède depuis des mois les entreprises françaises, grandes habituées des mouvements sociaux, à commencer par la première d’entre elles, la SNCF.

La dernière grève des contrôleurs, organisée au milieu du chassé-croisé des vacances d’hiver, avait paralysé le trafic pendant un week-end. Pour éviter de nouveaux bras de fer entre syndicats et direction, Jean-Pierre Farandou, le patron de la SNCF, avait annoncé le lancement d’une nouvelle forme de dialogue social. « Je ne veux plus qu’on utilise la grève comme point d’entrée du dialogue social à la SNCF », avait-il déclaré le 22 février, lors d’une interview au Monde.

Dans le cadre d’une réunion sur les fins de carrière, il a dévoilé le 10 avril dernier aux organisations syndicales certaines propositions, qui devraient contribuer à la conclusion d’une paix sociale pré-JO. Le président du groupe SNCF s’est montré particulièrement généreux. L’accord prévoit l’allongement du dispositif de « cessation anticipée d’activité », qui permet aux agents souhaitant partir à la retraite plus tôt de ne pas être trop pénalisés financièrement.

Dans le cas où l’accord serait signé par la majorité des syndicats, ils pourront désormais bénéficier d’une telle mesure dix-huit mois avant la fin de leur carrière, avec neuf mois travaillés, puis neuf mois sans travailler pour un salaire maintenu à hauteur de 75 % pendant les dix-huit mois. Jusque-là, des dispositions en vigueur au sein de la SNCF permettent de partir douze mois plus tôt, pour une rémunération maintenue à hauteur de 60 %.

Les syndicats « agréablement surpris »

Pour les métiers les plus pénibles, comme celui de conducteur, ce dispositif passe à trente mois, avec une rémunération à 100 % pendant les quinze mois travaillés, puis à 75 % le reste du temps. L’accord contient aussi des dispositions généreuses sur le temps partiel et l’instauration d’un grade supplémentaire dans l’échelle salariale. Il permettra aux cheminots ayant dépassé les 55 ans d’obtenir une dernière augmentation, de l’ordre de 3,8 %, selon les calculs du syndicat Unsa.

« On savait que l’entreprise accorderait des avancées, mais on est agréablement surpris qu’elles soient de ce niveau », salue Didier Mathis, secrétaire général de l’Unsa ferroviaire, le deuxième syndicat majoritaire à la SNCF. Après avoir consulté leurs adhérents – « qui étaient pour à 100 % » –, l’Unsa a signé l’accord ce lundi. De son côté, la CGT avait annoncé son intention de valider l’accord dès le 11 avril.« Ces négociations apportent des droits nouveaux pour tous », s’est réjouie la première organisation syndicale.

L’Unsa et la CGT représentant à elles seules 50 % des cheminots,« on a donc la certitude que l’accord est validé et entrera en vigueur au 1er janvier 2025 », précise Didier Mathis. La CFDT a aussi fait part de son intention de signer. De son côté, SUD-Rail n’a pas communiqué sur sa décision.« Ce sont nos adhérents qui se prononceront », se contente d’indiquer l’organisation dans un communiqué. Ils ont jusqu’au lundi 22 avril pour signer le texte. La direction de la SNCF, contactée, refuse de commenter ce brusque élan de générosité avant cette date. Le montant de l’opération n’est pas connu, alors que le transporteur est lesté d’une dette de 24,4 milliards d’euros.

Jackpot pour les contrôleurs

Le temps où Jean-Pierre Farandou déclarait le 13 février sur RTL qu’« on ne peut pas dire oui à tout » paraît déjà loin. Officiellement, cet accord a pour objectif d’aménager les fins de carrière, alors que les cheminots devront travailler deux ans de plus depuis l’instauration de la dernière réforme des retraites. La menace d’une grève pour les JO a néanmoins largement pesé dans les négociations. « En filigrane, il y avait certainement ça dans la tête de la direction parce qu’il y a un dispositif plus avantageux pour les chefs de bord que pour le reste des agents », admet Didier Mathis.

Les contrôleurs – ou « chefs de bord » dans le jargon maison – obtiennent en effet le droit de partir en cessation anticipée d’activité trente-six mois avant la fin officielle de leur carrière, contre trente mois pour les métiers pénibles. Une mesure qui paraît pourtant contradictoire avec les déclarations de Jean-Pierre Farandou, qui a toujours martelé ne pas vouloir faire de préférences catégorielles. Ce traitement de faveur ne ravit pas tous les syndicats.

Reste à savoir si la pommade passée par Jean-Pierre Farandou suffira à éviter un nouveau mouvement social pendant les Jeux olympiques ou si les syndicats chercheront à obtenir davantage. SUD-Rail a déposé un préavis de grève pour la période couvrant les ponts du mois de mai. Sera-t-il levé en cas de signature de l’accord ? « Les points conflictuels repris dans le préavis ne sont pas tous liés à la table ronde sur la fin de carrière », fait savoir Julien Troccaz, le secrétaire fédéral de SUD-Rail, troisième syndicat en matière de représentativité à la SNCF avec 18,7 % des voix aux dernières élections professionnelles.


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