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Finances publiques : Moscovici avertit le prochain gouvernement

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S‘il y a bien une époque où Pierre Moscovici en a bavé, c’est quand il était ministre de l’Économie et des Finances. « J’ai vraiment eu à faire un sale boulot », nous confiait-il en privé, fin 2023, alors que nous évoquions avec lui ces années de difficile austérité entre 2012 et 2014.

Depuis, il a, selon ses propres mots, « quitté la politique ». Mais pas les affaires publiques. Après avoir rejoint les technocrates de la Commission européenne en tant que commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, le socialiste a pris en 2020 la tête de la Cour des comptes, en remplacement de Didier Migaud. Et il s’épanouit dans cette institution dont l’adage est, rappelle-t-il en ce début juillet lors d’une conférence de presse, « rétablir l’ordre par la lumière ».

Du haut de son perchoir de premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici est en effet devenu une sorte de Grand Sage, qui distribue depuis quatre ans au gouvernement macroniste des coups de griffe sur sa gestion des finances publiques.

Ce lundi 15 juillet, lendemain de fête nationale, aura été une sorte de bouquet final avant la mise en branle d’un nouvel exécutif, avec la publication du traditionnel rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques. Retardé de quelques jours à cause des élections législatives, cet épais pensum est à la fois un bilan de ces dernières années Macron et une prescription pour le prochain gouvernement.

Crash test

Car s’il fallait résumer en un mot la situation de nos finances publiques, Pierre Moscovici a choisi le sien : « inquiétante ». Dans son costume sombre, il le martèle avec vigueur. D’autant plus après une année 2023 qui aura été, selon les termes du rapport, « une très mauvaise année pour les finances publiques », avec un dérapage surprise du déficit à 5,5 % du PIB (supérieur à celui de 2022 de 0,7 point), alors que la conjoncture était plutôt favorable.

Une dégradation due à la fois à une faible croissance des prélèvements obligatoires, à de nouvelles baisses d’impôts et à l’absence de véritables économies structurelles. Et un cru 2024 « soumis à des risques importants », à la fois du côté des dépenses et des recettes. Résultat, la trajectoire qui était celle du gouvernement sortant (retour sous les 3 % de déficit d’ici à 2027) semble aux Sages « peu réaliste ». La Cour des comptes a en effet soumis cette hypothèse au crash test de trois scénarios différents : la cible n’était atteinte dans aucun des cas.

Un bilan qui a, bien évidemment, hérissé le poil du ministre de l’Économie sortant. Dans la foulée de la publication du rapport de la Cour des comptes, Bruno Le Maire a défendu son bilan, rappelé qu’il avait engagé pour cette année « 25 milliards d’euros d’économie contre l’avis de toutes les oppositions et dans une certaine solitude », et remis en cause un certain nombre de critiques des Sages de la rue Cambon (absence de réformes structurelles, prévisions de croissance optimiste, etc.).

« Ras-le-bol fiscal »

L’arrivée d’un nouvel exécutif est de toute façon en train de rebattre les cartes. Mais l’ordonnance de Pierre Moscovici demeure la même que celle qu’il a répétée ces dernières années au gouvernement Macron : « réduire le déficit public et la dette », un impératif qui n’est « ni de droite, ni de gauche, mais d’intérêt public », face à un service de la dette en augmentation, « la dépense publique la plus bête qui soit ». Et l’ancien ministre de François Hollande d’avertir le prochain gouvernement : ce choix « nécessite du courage et de la fermeté » .

Cela dit, l’inventeur de la formule « ras-le-bol fiscal » n’a pas voulu préciser son ordonnance, lui qui a « horreur » des experts qui disent aux politiques ce qu’ils doivent faire, laissant au prochain gouvernement le choix des modalités et du rythme.

L’ancien locataire de Bercy s’est contenté de souligner qu’il existait trois voies pour assainir les finances publiques : la croissance, qu’il ne faut pas « sacrifier » sur l’autel de l’austérité, les hausses de recettes fiscales (« le débat fiscal n’est pas interdit », a rappelé celui qui s’était pourtant insurgé contre le poids des prélèvements obligatoires en France quand il était ministre de l’Économie) et les baisses de dépenses. Avant de charger le prochain gouvernement de construire une « trajectoire crédible et sincère » pour les finances publiques : « Les 3 % en 2027, je n’y croyais déjà plus avant, mais il faut quand même dire quand et comment on le fait. »


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