Statu quo : le taux de chômage n’a pas bougé d’un iota au premier trimestre 2024. Comme les trois mois précédents, il a atteint les 7,5 % de la population active, a annoncé l’Institut national de la statistique (Insee), ce vendredi 17 mai. Bonne nouvelle ? Pour le gouvernement, c’est mi-figue, mi-raisin. Certes, contrairement aux prévisions les plus pessimistes, il n’a pas continué son ascension entamée depuis le point bas du début de l’année 2023 à 7,1 %. Mais il reste bien loin de l’objectif de plein-emploi poursuivi par l’Élysée, qui souhaiterait ramener le chômage à 5 % en 2027…
Ce chiffre de 7,5 % est en tout cas du pain bénit pour l’exécutif qui devrait annoncer la semaine prochaine une nouvelle réforme de l’assurance-chômage. Encore ! Depuis l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, le système a déjà été réformé en 2019, en 2021 et en 2023… Et l’exécutif remet à nouveau l’ouvrage sur le métier, pour durcir les dispositions qui permettent d’indemniser les demandeurs d’emploi. Fin mars, le Premier ministre Gabriel Attal avait ainsi déclaré lors d’une interview sur TF1 qu’il souhaitait une « réforme d’activité et de prospérité ». Mais pour quelles raisons le gouvernement souhaite-t-il à nouveau serrer la vis ?
Échec de la négociation
D’abord, parce que les partenaires sociaux, qui sont censés décider des règles du système d’assurance-chômage, n’ont pas réussi à se mettre d’accord lors de leurs dernières négociations sur l’emploi des séniors. Mais quel est le rapport entre ce sujet et l’indemnisation des chômeurs ? Et bien, en novembre dernier, les syndicats et le patronat avaient négocié les nouvelles règles de l’assurance-chômage pour la période allant de 2024 à 2027. Les syndicats avaient alors accepté une mesure d’économies sur les chômeurs les plus âgés. Mais conditionné à un effort du patronat sur l’emploi des séniors lors d’une négociation ultérieure… Un flop. Face à l’échec de cette dernière négociation au printemps, le gouvernement a décidé de reprendre la main.
De reprendre la main… et de mettre en place des règles plus dures, afin d’inciter les chômeurs à retrouver au plus vite un travail, et d’atteindre rapidement l’objectif de plein-emploi. « Nous avons toujours un niveau de tension élevé sur le marché du travail, avec des difficultés de recrutement qui demeurent plus importantes qu’avant le Covid, souligne Marc Ferracci, député Renaissance et économiste. Nous avons besoin de cette réforme comme d’un levier supplémentaire pour aller vers le plein-emploi. » Supplémentaire mais pas unique, car une réforme du travail est également attendue à la rentrée.
8 % de chômage d’ici à la fin de l’année
En effet, l’exécutif ne peut plus compter sur une conjoncture favorable pour atteindre son objectif de plein-emploi. Notre économie subit les effets du resserrement monétaire, qui diminue les créations d’emplois, et de la réforme des retraites, qui devrait gonfler la population active. L’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) estime que le taux de chômage devrait dépasser les 8 % d’ici à la fin de l’année. Pour le moment, plusieurs pistes ont été évoquées par le gouvernement : le tour de vis pourrait passer par une modification de la durée d’indemnisation, d’affiliation ou du niveau d’indemnisation.
« Mais on ne peut pas écarter non plus la motivation budgétaire », souligne Éric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l’OFCE. Après le dérapage du déficit à 5,3 % l’an dernier, le gouvernement doit en effet trouver des mesures d’économie tous azimuts pour contenir la dérive des finances publiques cette année. Selon la Commission européenne, la France ne pourra pas respecter sa trajectoire d’assainissement cette année et la menace d’une procédure pour déficit excessif plane sur l’Hexagone. Autre échéance : l’agence de notation S & P fera une mise à jour de la note de la France le 31 mai prochain et l’éventualité d’une dégradation n’est pas exclue.