Au Togo, des législatives pour verrouiller le pouvoir de Faure Gnassingbé

Date:

Si la manœuvre réussit, Faure Essozimna Gnassingbé n’aura plus besoin de se soumettre directement au verdict des urnes. Le président togolais, propulsé à la tête de l’Etat par l’armée, le 6 février 2005, au lendemain de la mort de son père, Gnassingbé Eyadéma, s’annonce comme le principal bénéficiaire du changement de Constitution qui a fait récemment basculer son pays dans un régime parlementaire. Un bouleversement que les Togolais sont appelés à entériner, lors des élections législatives et régionales prévues lundi 29 avril.

Votée une première fois en catimini, le 25 mars, et adoptée le 19 avril en deuxième lecture à l’unanimité des 87 députés présents, la nouvelle Constitution – si l’on en croit les extraits qui ont filtré sur les réseaux sociaux, car aucun texte n’a été officiellement publié – consacre la toute-puissance du chef du gouvernement, au détriment du président de la République. Ce dernier, élu pour un mandat de quatre ans renouvelable une fois par le Parlement réuni en congrès – alors qu’auparavant il était élu au suffrage universel direct – n’a plus, désormais, qu’un rôle honorifique.

Le vrai pouvoir revient au « président du conseil des ministres » désigné par l’Assemblée nationale, sans limitation de mandat. Chef des armées et responsable de la politique étrangère, ce « super premier ministre » décidera des grandes orientations du pays. Un poste taillé sur mesure pour Faure Gnassingbé, leader du parti au pouvoir et prétendant naturel à cette fonction. Même si l’intéressé n’a rien dit de ses intentions, l’opposition appelle à transformer le double scrutin législatif et régional en référendum contre ce bouleversement institutionnel.

Un procédé critiqué

Les quelque 4,2 millions de Togolais qui doivent élire, lundi, leurs 113 députés et 179 conseillers régionaux n’ont pas été consultés sur le changement de régime. Le procédé est d’autant plus critiqué par l’opposition et la société civile qu’il « viole », disent ses détracteurs, l’article 59 de la Constitution en vigueur depuis 1992, selon lequel le mode d’élection du président de la République ne peut être changé que par voie référendaire. « Il faut appeler un chat un chat : ce qui se passe au Togo, c’est un coup d’Etat constitutionnel. Il y a déjà eu des tripatouillages de la loi par le passé pour permettre au président de se maintenir, mais là, le cadre a complètement explosé », s’indigne l’universitaire togolais Jonas Siliadin.

Le pouvoir, lui, se défend de toute entorse au droit, arguant que les députés – quand bien même leur mandat a expiré en décembre 2023 – étaient légalement en mesure de réviser la Constitution. « Nous avons une majorité qui s’assume, expliquait au Monde, début avril, le ministre de la fonction publique, Gilbert Bawara. Un des objectifs de la réforme est de réduire le nombre de consultations électorales, parce que ce sont des moments qui génèrent des tensions, parfois même des crises. Sans oublier les ressources financières qu’il faut y consacrer. »

Il vous reste 56.22% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Share post:

Subscribe

spot_imgspot_img

Popular

More like this
Related