« On est tous énervés. On va bientôt se taper dessus parce que l’un a mis son chapeau de travers, parce que l’autre n’a pas mis son clignotant. Tenez, le 21 juin, Fête de la musique. Je rentre chez moi, je roule à 80 kilomètres-heure. Je me fais doubler par un chauffard, alors que je suis à la limite de vitesse. Moi, je ne suis pas content, j’applaudis comme un con dans ma voiture, genre “bravo mon gars”. Eh bien, le type s’est arrêté un peu plus loin, il m’a attendu. “Y a un problème ?” J’ai passé mon chemin, je ne me suis pas arrêté, ça aurait envenimé les choses. Vous regardez une fille dans la rue parce qu’elle est jolie, vous vous faites engueuler ! Vous n’avancez pas assez vite au volant, on vous casse la gueule ! Les gens sont aigris. C’est dangereux, parce qu’après, on a peur de tout. Et on ne sait plus vivre ensemble. C’est ça qui me fait peur aujourd’hui. Mais qu’est-ce que vous voulez faire contre ça ? Vous voulez interdire quoi ?
Avant, on pouvait discuter. Il y a quelques années en arrière, dix, vingt, on était main dans la main. J’étais dans un collège où tout le monde était mélangé. Maintenant, on nous stigmatise sur des choses infondées. Quand vous écoutez les conneries politiques à la télé, tout est mélangé, on ne comprend plus rien. Ça fatigue tout le monde.
C’est trop brouillon, c’est pour ça que les gens en ont marre. Ils se paument un peu. Moi, pendant les débats, j’ai coupé la télé. Je les ai vus blablater, on aurait dit un combat de coqs, ou une cour de récré. Je ne sais pas de quoi ils parlent, ce n’est pas concret. Au lieu de nous proposer leurs idées, ils se crient dessus, à celui qui critiquera le plus les autres : “Vous n’avez jamais fait mieux que moi…”
Dimanche, je ne suis pas allé voter. Une voix de plus ou de moins, qu’est-ce que ça va changer ? Rien ! Ce n’est pas moi qui déciderai du sort du pays. On verra bien au second tour, si on y voit plus clair, peut-être que j’irai. Mais, pour le moment, je n’ai pas assez suivi, je ne sais pas qui est arrivé en tête chez moi. J’ai regardé un petit peu les résultats à la télé, sans plus. Honnêtement, on n’avait pas trop le choix, c’était sur toutes les chaînes de la TNT !
« Je ne les connais pas trop »
Il se passera ce qui doit se passer. Moi, je subirai ce qu’il y aura à faire, et puis c’est tout. Là où je me déplace pour voter, c’est pour élire le maire de ma commune. Là, c’est du concret. A Reims [où il vit], avant, c’était Mme [Adeline] Hazan [maire socialiste de 2008 à 2014]. Ça, c’était une dame à l’écoute de ses concitoyens. Pour moi, c’est plus clair : les travaux sur la voirie, ce qu’ils proposent pour ma petite ville…
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