Dans la théorie économique, la monnaie est le symbole de la souveraineté. En Nouvelle-Calédonie aussi. Ce sont des raisons exclusivement politiques qui ont primé en 2002, lorsque l’archipel a choisi de ne pas adopter l’euro alors que la France renonçait au franc. Si bien qu’avec la Polynésie et Wallis-et-Futuna, la Nouvelle-Calédonie utilise encore aujourd’hui une monnaie spécifique : le franc Pacifique.
Cette monnaie, frappée à la Monnaie de Paris avant d’être acheminée par bateau vers l’autre côté du globe, a été créée en 1945 pour remplacer le franc des colonies françaises du Pacifique qui avait cours dans la région. Lors du passage au nouveau franc, en 1960, le franc Pacifique a été doté d’une parité fixe avec la monnaie de métropole, conservée ensuite lors du passage à l’euro. Elle n’a pas évolué depuis : 1 000 francs Pacifique valent ainsi 8,38 euros. Aujourd’hui, la masse de pièces et de billets de francs CFP (Change franc Pacifique) en circulation s’élève à l’équivalent de 615 millions d’euros.
La question du rattachement à l’euro se pose toutefois à intervalles réguliers, souvent à l’initiative des milieux économiques des trois territoires ultramarins, soucieux de simplification. Le change étant fixe, l’existence d’une monnaie spécifique n’a guère de sens économique, d’autant que ces trois territoires sont fortement arrimés à l’économie de la métropole. La France est en effet le premier partenaire commercial de ces archipels. La Polynésie est la plus désireuse des trois de vouloir rejoindre l’euro, le secteur du tourisme y mettant en avant des arguments de lisibilité de l’offre pour sa clientèle internationale.
Culture locale
Le sujet divise en revanche en Nouvelle-Calédonie, où la monnaie est vue comme un symbole d’indépendance vis-à-vis de la métropole. Les billets et pièces en circulation sont en effet frappés de figures de la culture locale. Les loyalistes tendent à être favorables à un rattachement à l’euro, considéré comme un facteur d’intégration, tandis que les indépendantistes ont fait du CFP un emblème identitaire et s’y opposent farouchement. Les autorités de Wallis-et-Futuna suivent traditionnellement les décisions de la Nouvelle-Calédonie.
La position de l’Etat français n’a quant à elle pas évolué depuis 2005 : Jacques Chirac avait alors estimé qu’un passage à l’euro devrait, s’il se produisait, avoir lieu dans les trois collectivités simultanément. Faire basculer l’un d’eux dans l’euro risquerait en effet de remettre en question tout l’édifice monétaire. Avoir une politique monétaire spécifique pour un ou deux archipels seulement coûterait cher.
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