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Le Rassemblement national, de l’euphorie à la stupéfaction après son bon score aux européennes et l’annonce d’une dissolution

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La dissolution de l’Assemblée nationale, le Rassemblement national (RN) la réclamait comme un réflexe pavlovien, sans jamais compter dessus. Après chacune de ses victoires électorales, à chaque soubresaut de la vie politique française, Marine Le Pen appelait à ce « retour au peuple » et, dans le même souffle, exprimait le regret que le président de la République en place – que ce soit Nicolas Sarkozy, François Hollande ou Emmanuel Macron – n’ose pas le faire. Dimanche 9 juin, au soir des élections européennes, rompant l’ambiance guillerette qui flottait dans un pavillon du bois de Vincennes où la formation lepéniste trinquait à un score historique (31, 5 % pour la liste menée par Jordan Bardella), la dissolution s’est invitée sans prévenir.

Jusqu’au bout, le conseiller spécial de Marine Le Pen, son beau-frère Philippe Olivier, n’y a pas cru. Le chef de l’Etat « n’a pas le courage », assurait-il au Monde vingt minutes plus tôt, quand couraient les premières rumeurs : « Il va rester dans le rôle du commentateur et agacer tout le monde. » Ses yeux fixent sur l’écran géant le visage d’Emmanuel Macron, un peu caché par les drapeaux tricolores et les caméras. Suspendu aux lèvres présidentielles, Philippe Olivier répète, pour lui-même et pour les quelques journalistes qui l’entourent : « Je vous donne ma parole que non. » Emmanuel Macron continue : « J’ai décidé de vous redonner le choix… » Les militants exultent : « Dissolution ! Dissolution ! »

Le conseiller et député européen est groggy. Il file retrouver Marine Le Pen et Jordan Bardella, qui suivent les résultats entourés de leur garde rapprochée dans un salon privé, et ont eu vent de la décision du locataire de l’Elysée peu avant son allocution. Le discours préparé par Philippe Olivier pour Marine Le Pen ne prévoyait pas l’hypothèse d’une dissolution. On y apporte à la hâte quelques retouches.

« C’est ce qu’on voulait, mais bon… »

Un quart d’heure plus tard, Marine Le Pen descend, flanquée de Jordan Bardella, passé au second plan, comme ses 31,5 % aux élections européennes. Elle devait se projeter sur l’avenir, marteler que le RN se voyait désigné comme « force d’alternance » – la même expression qu’après sa victoire en 2019 – et assurer que le parti était « prêt ». Le fond du discours ne change donc pas ; l’échéance, oui. Alors que le RN se projetait à trois ans, le mur est finalement dans vingt jours. Vertigineux.

Est-ce la raison du sourire crispé qu’arbore Jordan Bardella, quelques pas en retrait de la députée du Pas-de-Calais ? Depuis neuf mois, Marine Le Pen tente d’installer l’idée qu’il a une bonne tête de premier ministre. Elle n’en dit pas un mot à la tribune, mais dans son esprit, rien n’a changé, précise son entourage : en cas de victoire de son parti aux prochaines législatives, elle déclinera une éventuelle invitation du chef de l’Etat à former un gouvernement et réclamera que cette charge revienne à Jordan Bardella.

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