Home Finance les syndicats remontés contre une proposition de la Cour des comptes

les syndicats remontés contre une proposition de la Cour des comptes

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Un constat alarmant et des propositions chocs. C’est ce que contient le rapport annuel de la Cour des comptes sur la Sécurité sociale publié mercredi. Commençons par le constat : le déficit de la Sécu pour 2023 s’élève à 10,8 milliards d’euros.

La loi de financement de la Sécurité sociale adoptée fin 2022 pour 2023 prévoyait pourtant 7,1 milliards d’euros. Et ce déficit devrait encore augmenter en 2024, notamment du fait de l’indexation des retraites sur les prix. Jusqu’à atteindre, selon les prévisions de la Cour des comptes, 17 milliards d’euros en 2027.À LIRE AUSSI La France doit-elle vraiment réduire ses dépenses publiques ?

« Les conditions de financement de la dette sociale doivent donc être redéfinies », écrit la Cour des comptes. Les Sages de la rue Cambon ont identifié deux facteurs importants de l’explosion de cette dette. D’abord, les allègements de cotisations sociales sur les compléments de salaire dans le secteur privé. Ces exonérations ont représenté près de 88 milliards d’euros de manque à gagner pour l’État en 2024.

Allonger le délai de carence, une mauvaise idée ?

Le second levier est celui qui a été le plus relayé par les médias et qui a fait le plus réagir : les indemnités d’arrêts de travail pour maladie. Ces dernières ont fortement augmenté ces dernières années, passant de 7,7 milliards d’euros en 2017 à 12 milliards d’euros en 2022.

Afin de faire des économies, la Cour propose de modifier les règles de cette indemnisation. Plusieurs pistes sont proposées, estimations chiffrées à l’appui. « Une première hypothèse consisterait à ne plus indemniser les arrêts de travail de moins de huit jours, explique le rapport. Cette mesure permettrait à l’Assurance maladie d’économiser 470 millions d’euros (sur la base des dépenses en 2022). »

« Une deuxième hypothèse serait de porter le délai de carence de trois à sept jours pour tous les arrêts, quelle que soit leur durée, poursuivent les auteurs du rapport. Si cette dernière mesure était appliquée y compris pour les affections de longue durée, elle permettrait une économie d’environ 945 millions d’euros pour l’Assurance maladie. »

« Avec cette proposition de s’attaquer à l’indemnisation des arrêts de travail, la Cour des comptes fait de la politique, ce qu’elle n’est pas censée faire, se fâche François Hommeril, le président du syndicat CFE CGC sollicité par Le Point. La Cour des comptes doit seulement vérifier que l’argent public est bien utilisé par rapport aux objectifs que s’est fixés l’État. »

Quand vous avez perdu quatre jours de salaire, c’est très compliqué pour vous de finir le mois décemmentLéonard Guillemot, de la CFTC

Conscient du tollé que la Cour des comptes a suscité avec cette proposition, son premier président, Pierre Moscovici, s’est personnellement chargé d’une mise au point, publiée ce jeudi. « La Cour ne privilégie aucune mesure en particulier, mais chiffre les économies qu’apporteraient différentes mesures, écrit l’ancien ministre socialiste dans un communiqué. Celle, souvent citée, d’arrêt de l’indemnisation des arrêts de travail de moins de huit jours, reviendrait, dans la plupart des cas, à une prise en charge des arrêts de travail, avec maintien du salaire, par les entreprises jusqu’à sept jours, au lieu de trois jours actuellement. Les affections de longue durée ne seraient pas concernées. »

« L’augmentation du délai de carence va accentuer l’inégalité qui existe déjà entre, d’un côté, beaucoup de grandes entreprises où l’employeur assure le maintien de salaire dès le premier jour d’arrêt, et de l’autre côté, les petites entreprises où ce n’est pas le cas », répond François Hommeril.

« Les économies réalisées [qui seraient donc, au mieux, de 945 millions d’euros, NDLR] ne seraient pas à la hauteur du préjudice que subiraient les salariés », complète auprès du Point Léonard Guillemot, chef de file sur les questions santé à la CFTC. « Quand vous avez perdu quatre jours de salaire, pourtant à la suite d’un arrêt prescrit par le médecin, c’est très compliqué pour vous de finir le mois décemment », ajoute-t-il. Avant de conclure : « Il vaut mieux questionner le niveau des allégements de cotisations sociales afin d’aller chercher les euros manquants que la réduction du délai de carence ne suffira pas à combler. »


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